Arrêt Du Tribunal (Dixième Chambre) Du 4 Juin 2025.
EZ contre Commission européenne.
• 62024TJ0450 • ECLI:EU:T:2025:569
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ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre)
4 juin 2025 ( * )
« Fonction publique – Agents contractuels – Contrat à durée déterminée – Non-renouvellement – Rapport de fin de stage – Rapport d’évaluation – Erreur manifeste d’appréciation – Devoir de sollicitude – Règle de concordance – Responsabilité »
Dans l’affaire T‑450/24,
EZ, représenté par M e K. Djaber, avocate,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par M me G. Niddam et M. A. Sauka, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL (dixième chambre),
composé de M me O. Porchia (rapporteure), présidente, MM. P. Nihoul et S. Verschuur, juges,
greffier : M. V. Di Bucci,
vu la phase écrite de la procédure,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
1 Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, le requérant, EZ, demande, en premier lieu, l’annulation de la décision de la Commission européenne du 25 octobre 2023 de ne pas renouveler son contrat de travail (ci‑après la « décision attaquée ») ainsi que, pour autant que de besoin, de la décision de l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci‑après l’« AHCC ») de la Commission du 29 mai 2024 portant rejet de sa réclamation introduite à l’encontre de cette décision (ci‑après la « décision de rejet de la réclamation ») et, en second lieu, sa réintégration au sein de la Commission ou, à défaut, la réparation des préjudices qu’il aurait subis du fait de ces décisions.
I. Antécédents du litige
2 Du 25 mars 2019 au 31 mai 2021, le requérant a travaillé en tant qu’agent temporaire dans différentes unités de l’Office « Infrastructures et logistique » à Luxembourg (OIL) de la Commission, dont [ confidentiel ] ( 1 ), sur la base de plusieurs contrats d’intérim successifs conclus avec une agence d’intérim à Luxembourg.
3 Du 1 er juin 2021 au 31 janvier 2023, le requérant a travaillé en tant qu’agent temporaire, classé dans le groupe de fonctions « secrétaire/commis », au grade 2, au service de [ confidentiel ], en tant que membre des équipes de proximité logistique de certains bâtiments de l’OIL. Il a été embauché sur le fondement de l’article 2, sous b), du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA »).
4 Le 1 er février 2023, le requérant a été engagé par la Commission en tant qu’agent contractuel pour la période comprise entre le 1 er février 2023 et le 31 janvier 2024 au titre d’un contrat à durée déterminée d’un an, sur le fondement de l’article 3 bis du RAA (ci‑après le « contrat d’agent contractuel »). Il a été affecté en qualité d’agent logistique au service de l’OIL, au sein du [ confidentiel ], dans le groupe de fonctions II, au grade 5, échelon 1. Ce contrat prévoyait une période de stage de 9 mois se terminant le 31 octobre 2023.
5 Le 4 septembre 2023, l’OIL a lancé la « procédure d’évaluation de fin de stage », complétée le 2 octobre 2023 par l’auto-évaluation du requérant.
6 Le 13 octobre 2023, un entretien s’est déroulé entre le requérant et son chef d’unité pendant lequel le premier a été informé de l’intention de l’OIL de ne pas renouveler son contrat d’agent contractuel.
7 Par la décision attaquée, l’administration a informé le requérant du fait que son contrat d’agent contractuel ne serait pas renouvelé. Dans cette décision, l’administration a indiqué que « la qualité des prestations [du requérant] ne correspond[ait] pas aux standards élevés exigés des agents de [son] groupe de fonctions pour ce type de tâches ».
8 Le 27 octobre 2023, le chef d’unité du requérant a rédigé le rapport d’évaluation de fin de stage de ce dernier (ci‑après le « rapport de stage »). Le 6 novembre 2023, le rapport de stage a été confirmé par le directeur de l’OIL en qualité de validateur. Le même jour, le requérant a ajouté ses observations sur ce rapport.
9 Le 22 décembre 2023, le requérant a introduit une réclamation à l’encontre de la décision attaquée.
10 Le 6 février 2024, le requérant a été contacté par la secrétaire de son supérieur hiérarchique afin de participer à un entretien d’évaluation concernant ses prestations au sein de la Commission en 2023, lequel a eu lieu le 21 février 2024.
11 Le 6 mars 2024, le rapport d’évaluation pour l’année 2023 a été finalisé.
12 Par la décision de rejet de la réclamation, adoptée le 29 mai 2024, l’AHCC de la Commission a rejeté la réclamation en cause.
II. Conclusions des parties
13 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– en tant que de besoin, annuler la décision de rejet de la réclamation ;
– lui accorder sa réintégration au sein de la Commission ; sinon,
– lui accorder une indemnisation au titre du préjudice matériel à hauteur de 48 697,88 euros ; sinon,
– lui accorder une indemnisation au titre de la perte de chance sérieuse d’obtenir le renouvellement de son contrat de travail, à hauteur de 90 % des traitements bruts, y compris les contributions au régime des pensions ;
– lui accorder une indemnisation au titre du préjudice moral évalué ex æquo et bono à 10 000 euros ;
– condamner la Commission aux dépens.
14 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner le requérant aux dépens.
III. En droit
A. Sur l’objet du recours
15 Par son deuxième chef de conclusions, le requérant demande l’annulation de la décision de rejet de la réclamation.
16 À cet égard, il convient de rappeler que le recours, même formellement dirigé contre la décision de rejet de la réclamation, a pour effet de saisir le juge de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée, sauf dans l’hypothèse où le rejet de la réclamation a une portée différente de celle de l’acte contre lequel cette réclamation a été formée (voir arrêt du 9 juin 2021, Lianopoulou/Commission, T‑880/19, non publié, EU:T:2021:325, point 22 et jurisprudence citée).
17 En outre, compte tenu de ce que la procédure précontentieuse présente un caractère évolutif, une décision explicite de rejet de la réclamation, qui ne contient que des précisions complémentaires et se borne ainsi à révéler, de manière détaillée, les motifs de la confirmation de la décision antérieure, ne constitue pas un acte faisant grief. Néanmoins, ce même caractère évolutif de la procédure précontentieuse implique que ces précisions complémentaires soient prises en considération pour apprécier la légalité de l’acte attaqué (voir arrêt du 9 juin 2021, Lianopoulou/Commission, T‑880/19, non publié, EU:T:2021:325, point 23 et jurisprudence citée).
18 En l’espèce, ainsi que le fait valoir la Commission sans être contredite sur ce point par le requérant, il y a lieu de relever que la décision de rejet de la réclamation, même si elle comprend des précisions complémentaires, confirme et ne remet pas en question les motifs et le sens de la décision attaquée.
19 Il s’ensuit que le présent recours doit être regardé comme étant dirigé contre la décision attaquée uniquement, telle que complétée par la décision de rejet de la réclamation.
B. Sur le fond
1. Sur les conclusions en annulation
20 À l’appui des conclusions en annulation, le requérant soulève deux moyens, tirés, le premier, d’une erreur manifeste d’appréciation et, le second, d’une violation du devoir de sollicitude.
a) Sur le premier moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation
21 Le requérant fait valoir, en substance, que la décision attaquée est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation en ce que, d’une part, la Commission n’aurait pas apprécié correctement la durée de sa relation contractuelle avec l’administration et, d’autre part, elle n’aurait pas apprécié correctement ses performances pendant toute cette durée.
22 En premier lieu, le requérant, après avoir rappelé que, compte tenu du large pouvoir d’appréciation dont disposent les institutions européennes au sujet du renouvellement de contrats, le contrôle du juge de l’Union européenne est limité à la vérification de l’absence d’erreur manifeste ou de détournement de pouvoir, soutient que la décision attaquée n’apparaît ni justifiée, ni sérieuse, ni réelle. En effet, le requérant aurait occupé un poste au sein des différents services de l’OIL du 25 mars 2019 au 31 janvier 2024, ce qui démontrerait que, pendant plusieurs années, il a donné satisfaction dans tous les postes qu’il a occupés. Le requérant ajoute que, compte tenu du fait qu’il a été employé dans différents services de l’OIL [ confidentiel ], soit pratiquement pendant cinq ans sans discontinuer, la décision attaquée devait prendre en compte ses états de service précédents. Par ailleurs, il avance que, même si son employeur direct n’était pas la Commission, le travail accompli l’a été au bénéfice direct de celle-ci.
23 En second lieu, le requérant fait valoir qu’il n’existait aucune raison objective de conclure que ses performances ne répondaient pas aux exigences du poste qu’il occupait. Au contraire, ses performances auraient manifestement surpassé les attentes inhérentes à ses fonctions.
24 À cet égard, d’une part, le requérant allègue que les critères figurant dans la description du poste restent flous, de sorte qu’il ne lui a pas été possible de savoir comment s’améliorer pour atteindre les standards évoqués par l’AHCC dans la décision de rejet de la réclamation. Selon le requérant, il aurait été judicieux de privilégier une communication plus proactive au sujet des standards attendus, ce qui lui aurait permis d’améliorer ses prestations si celles-ci ne correspondaient pas aux standards requis. Le requérant dit avoir accompli les tâches qui lui ont été confiées avec rigueur. Il allègue qu’il bénéficie d’une excellente réputation et qu’il n’a jamais fait l’objet d’un rappel à l’ordre ni reçu un avertissement dans l’exécution de son travail. Par ailleurs, le requérant fait valoir que les reproches relatifs à des absences injustifiées ou à une absence d’implication dans certains évènements et certaines réunions ne concerneraient que le dernier poste qu’il a occupé.
25 D’autre part, premièrement, le requérant fait valoir que, contrairement à ce que soutient la Commission, il a toujours veillé à optimiser les ressources de manière à ne faire appel aux services de [ confidentiel ] que lorsque cela s’avérait nécessaire, notamment pour des opérations complexes internes et des évènements impliquant une participation importante du personnel. Le requérant allègue qu’il s’occupait également du suivi des travaux et de la collaboration avec les prestataires par le biais d’un tableau Excel répertoriant tous les travaux, les déménagements ainsi que toutes les demandes d’intervention. Il fait également valoir que, pour s’assurer de la pertinence des informations qu’il répertoriait, il effectuait des visites dans les bâtiments lui permettant de vérifier sur place les demandes et d’obtenir des informations supplémentaires en cas de besoin. Sa collaboration avec [ confidentiel ] aurait donc toujours été bénéfique, garantissant une communication fluide et permettant de tenir des délais rapides.
26 Deuxièmement, le requérant ajoute qu’il a toujours été proactif, collaboratif et empreint de collégialité, contribuant à l’établissement de processus visant une gestion plus efficace de la charge de travail. Durant la période où il travaillait à [ confidentiel ], sa présence aurait été constante, à l’exception d’une journée du fait de la maladie d’un de ses enfants et de quelques jours d’arrêt en raison d’un test positif à la COVID-19, pendant lesquels il aurait cependant maintenu une disponibilité constante et réagi de manière proactive aux courriels urgents.
27 Troisièmement, en ce qui concerne son esprit d’initiative, le requérant fait valoir que, contrairement à ce que soutient la Commission, il l’a démontré à plusieurs reprises en mettant en place un tableau de suivi et en participant à des formations internes pour renforcer ses compétences en logistique et en sécurité au travail. Le requérant aurait suivi de près les travaux dans les aires de jeu du [ confidentiel ] et effectué une vérification minutieuse des poignées, des systèmes de fermeture défectueux, des fenêtres ainsi que de toutes les demandes d’intervention liées aux menuiseries dans le bâtiment [ confidentiel ], en étroite collaboration avec l’équipe de [ confidentiel ]. Par ailleurs, le requérant soutient que, lorsque les exercices d’évacuation ont eu lieu, il travaillait à distance et que, contrairement à ses collègues, il n’a pas été averti à l’avance de sorte qu’il n’a pas pu être présent auxdits exercices.
28 Quatrièmement, en ce qui concerne son implication dans l’organisation d’évènements et de réunions, le requérant soutient que le reproche de la Commission selon lequel son absence à la réunion de rentrée du personnel corroborait un manque de conscience de son rôle au sein du [ confidentiel ] n’est pas fondé. En effet, le requérant aurait coordonné les préparatifs de la salle, activé les microphones et mis en place le matériel nécessaire pour ladite réunion. Selon lui, bien qu’il n’ait pas assisté à cette réunion réservée au personnel éducatif, il était assidu à toutes les réunions mensuelles de l’équipe logistique en collaboration avec la direction. Une absence à une seule réunion ne suffirait donc pas pour considérer que le requérant manquerait de « conscience dans l’accomplissement de son rôle ». En outre, le requérant précise que le mois de septembre 2023 coïncidait avec la rentrée scolaire de ses enfants, de sorte qu’il a dû procéder à une adaptation de son emploi du temps, étant obligé de quitter le travail plus tôt pour travailler à distance. Il ajoute qu’il ne comprend pas que la Commission ait pu réduire à 40 ses heures travaillées sous prétexte qu’il n’aurait pas donné d’explication valable quant à ses absences. En effet, il aurait donné des explications claires et cohérentes et aurait été autorisé à quitter le lieu de travail plus tôt et à télétravailler pendant le mois de septembre 2023, en conformité avec le règlement de la Commission.
29 La Commission conteste les arguments du requérant.
30 À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, un agent contractuel titulaire d’un contrat à durée déterminée n’a en principe aucun droit au renouvellement de son contrat, cela n’étant qu’une simple possibilité subordonnée à la condition que ce renouvellement soit conforme à l’intérêt du service (voir arrêt du 19 février 2013, BB/Commission, F‑17/11, EU:F:2013:14, point 57 et jurisprudence citée).
31 En effet, à la différence des fonctionnaires, dont la stabilité de l’emploi est garantie par le statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci‑après le « statut »), les agents contractuels relèvent d’un autre régime à la base duquel se trouve le contrat d’emploi conclu avec l’institution concernée. Il ressort de l’article 85, paragraphe 1, du RAA que la durée de la relation de travail entre une institution et un agent contractuel, visé à l’article 3 bis du RAA, engagé à temps déterminé est précisément régie par les conditions établies dans le contrat conclu entre les parties. En outre, une jurisprudence également constante reconnaît à l’administration un large pouvoir d’appréciation en matière de renouvellement de contrat (voir arrêt du 19 février 2013, BB/Commission, F‑17/11, EU:F:2013:14, point 58 et jurisprudence citée).
32 Compte tenu du large pouvoir d’appréciation dévolu aux institutions au sujet du renouvellement des contrats, le contrôle du juge est limité à la vérification de l’absence d’erreur manifeste ou de détournement de pouvoir. Par ailleurs, une erreur peut seulement être qualifiée de manifeste lorsqu’elle est aisément perceptible et peut être détectée à l’évidence, à l’aune des critères auxquels le législateur a entendu subordonner l’exercice par l’administration de son pouvoir d’appréciation (voir arrêt du 11 novembre 2020, AD/ECHA, T‑25/19, non publié, EU:T:2020:536, point 94 et jurisprudence citée).
33 Établir que l’administration a commis une erreur manifeste dans l’appréciation des faits de nature à justifier l’annulation de la décision prise sur la base de cette appréciation suppose donc que les éléments de preuve, qu’il incombe à la partie requérante d’apporter, soient suffisants pour priver de plausibilité les appréciations retenues par l’administration. En d’autres termes, le moyen tiré de l’erreur manifeste doit être rejeté si, en dépit des éléments avancés par la partie requérante, l’appréciation mise en cause peut toujours être admise comme justifiée et cohérente (voir arrêt du 13 décembre 2017, HQ/OCVV, T‑592/16, non publié, EU:T:2017:897, point 31 et jurisprudence citée).
34 C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il convient d’examiner les arguments avancés par le requérant à l’appui du premier moyen.
35 En premier lieu, s’agissant de son argument selon lequel la décision attaquée devait prendre en compte ses états de service précédant la signature du contrat d’agent contractuel, il convient de rappeler d’emblée que, conformément à la jurisprudence citée au point 30 ci-dessus, en tant qu’agent contractuel titulaire d’un contrat à durée déterminée, le requérant n’a en principe aucun droit au renouvellement de son contrat. En outre, conformément à la jurisprudence citée au point 31 ci-dessus, la durée du contrat d’un agent contractuel engagé pour un temps déterminé est, en substance, régie par les seules conditions établies dans ledit contrat.
36 En l’espèce, le contrat qui a fait l’objet du non-renouvellement contesté par le requérant est le contrat d’agent contractuel conclu entre ce dernier et la Commission pour une durée déterminée allant du 1 er février 2023 au 31 janvier 2024.
37 Ainsi, l’appréciation de la qualité des prestations du requérant en vue du renouvellement éventuel de ce contrat doit uniquement prendre en compte les prestations effectuées par celui-ci pendant la période couverte par ledit contrat, à savoir la période comprise entre le 1 er février 2023 et le 31 janvier 2024, indépendamment du fait que le requérant ait été employé dans différents services de [ confidentiel ] à partir de 2019, sans discontinuer.
38 Dès lors, il y a lieu de constater que, contrairement à ce que le requérant prétend, en faisant référence à la seule période couverte par le contrat d’agent contractuel, la décision attaquée, complétée par la décision de rejet de la réclamation, n’est pas entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.
39 En second lieu, s’agissant de l’appréciation des performances, compétences et attitudes du requérant, à titre liminaire, il convient de souligner que, si, comme la Commission le soutient, l’évaluation de fin de stage et le renouvellement des contrats d’emploi poursuivent des finalités différentes et obéissent à des procédures différentes, la Commission ne saurait reprocher au requérant de ne pas avoir introduit de réclamation à l’encontre du rapport de stage, compte tenu notamment du fait qu’il a complété ledit rapport par son auto-évaluation et contesté la décision attaquée par une réclamation par laquelle il remet en cause les appréciations figurant dans ledit rapport. Par ailleurs, à cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, les rapports de stage, qui ont pour seul objet de préparer la décision de l’administration concernant la titularisation de l’intéressé à la fin de sa période de stage ou concernant son licenciement, ne sont pas des actes faisant grief au sens des articles 90 et 91 du statut et ne peuvent donc être attaqués de manière autonome par un recours en annulation (arrêt du 16 mars 2009, R/Commission, T‑156/08 P, EU:T:2009:69, point 55).
40 En outre, comme le requérant l’admet lui-même, compte tenu du large pouvoir d’appréciation de l’AHCC en matière de renouvellement de contrats à durée déterminée (voir point 31 ci-dessus), la seule circonstance que, dans le rapport de stage et dans le rapport d’évaluation pour l’année 2023, ses performances aient été jugées « satisfaisantes » ne saurait infirmer l’appréciation de l’AHCC sur l’opportunité de ne pas renouveler son contrat (voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2017, HQ/OCVV, T‑592/16, non publié, EU:T:2017:897, points 36 et 41 et jurisprudence citée).
41 En effet, si tant le rapport de stage que le rapport d’évaluation pour l’année 2023 comportent un certain nombre d’appréciations positives et une évaluation globale « satisfaisante », il ressort également de ces deux rapports que les performances du requérant étaient loin du niveau attendu des exigences du poste, telles que définies dans la description du poste d’agent de support logistique.
42 À cet égard, le requérant fait valoir, d’une part, que les critères figurant dans la description du poste revêtent un caractère flou et, d’autre part, n’avoir jamais reçu d’avertissement dans l’exécution de son travail, de sorte qu’il ne lui aurait pas été possible de savoir comment s’améliorer.
43 Cependant, tout d’abord, il convient de constater que l’allégation du requérant selon laquelle les critères figurant dans la description du poste revêtent un caractère flou de sorte qu’il ne lui aurait pas été possible de savoir comment s’améliorer est peu conciliable avec l’allégation selon laquelle ses performances auraient manifestement surpassé les attentes inhérentes à ses fonctions. Ensuite, contrairement à ce que prétend le requérant, la description du poste, figurant dans le dossier, comprend une liste claire et détaillée des fonctions et des responsabilités attendues ainsi qu’une liste détaillée des compétences requises, telles que la capacité « d’identifier des besoins de l’utilisateur », la capacité de « travailler d’une manière proactive et autonome », une « orientation vers la clientèle », le « souci du détail et de la précision » ainsi que la « capacité de travailler dans une équipe ». Enfin, à supposer que, comme le requérant le soutient, il n’ait jamais reçu de reproches dans l’exécution de son travail pendant les quatre années précédant la signature du contrat d’agent contractuel, il n’en reste pas moins qu’il reconnaît lui-même que certains reproches lui ont été adressés au regard du travail effectué dans le cadre de son dernier poste, à savoir le seul à devoir être pris en compte pour apprécier la légalité de la décision attaquée, telle que complétée par la décision de rejet de la réclamation.
44 Or, ces reproches sont mis en exergue tant dans le rapport de stage que dans le rapport d’évaluation pour l’année 2023.
45 Premièrement, il ressort de la section « efficacité » du rapport de stage ainsi que du rapport d’évaluation pour l’année 2023 que, « [p]our les prestations nécessitant des aménagements de locaux, [le requérant] se limite fréquemment à un mail aux équipes de [ confidentiel ] au lieu d’aller vérifier sur place si l’intervention peut être réalisée facilement en interne ». En outre, tant le rapport de stage que le rapport d’évaluation pour l’année 2023 relèvent que « [le requérant] ne s’est pas pleinement adapté aux contraintes de service propres au [ confidentiel ] et a limité en pratique ses tâches quotidiennes au suivi des tickets d’intervention ouverts, sans considération suffisante pour les autres tâches figurant dans sa description de poste, comme par exemple les inspections régulières et préventives des deux bâtiments, l’identification rapide des besoins d’intervention, ou la prise en main de tâches administratives de base comme effectuées par ses coéquipiers ». De plus, « malgré les réunions de coordination, au cours desquelles des explications et instructions ont été données, la participation d[u] [requérant] aux tâches d’ensemble assignées à l’équipe logistique a […] été limitée, alors que les missions assignées à l’équipe constituée de trois personnes sont larges et variées ».
46 Dans ses écritures, le requérant conteste ces affirmations en faisant valoir qu’il a toujours veillé à optimiser les ressources de manière à ne faire appel aux services de [ confidentiel ] que lorsque cela s’avérait nécessaire, notamment pour des opérations complexes internes et des évènements impliquant une participation importante du personnel. Pour le reste, il préparait lui-même les salles demandées lorsque la participation était moins importante. Il ajoute qu’il s’occupait également du suivi des travaux et de la collaboration avec les prestataires par le biais d’un tableau Excel répertoriant tous les travaux, les [ confidentiel ] ainsi que toutes les demandes d’intervention. Ce tableau permettait, selon lui, de suivre et de vérifier les interventions en cours ou déjà terminées. Par ailleurs, pour s’assurer de la pertinence des informations qu’il répertoriait, le requérant effectuait des visites dans les bâtiments qui lui permettaient de vérifier sur place les demandes et d’obtenir des informations supplémentaires en cas de besoin (voir point 25 ci-dessus).
47 Cependant, le requérant n’apporte aucun élément de preuve susceptible d’étayer ses affirmations et de remettre en cause les appréciations de la Commission. En particulier, il ne produit aucun élément de preuve visant à documenter le fait qu’il effectuait régulièrement des visites dans les bâtiments ainsi que cela était prescrit par la description de son poste.
48 Deuxièmement, le rapport de stage et le rapport d’évaluation pour l’année 2023 soulignent que le requérant « n’a pas été en mesure d’assurer une présence suffisante lors des [ confidentiel ], ou pour orienter sur place les [ confidentiel ] » et qu’« [il] n’a pas non plus été présent […] à la réunion de rentrée du personnel du [ confidentiel ] début septembre [et qu’il n’a donné aucune explication à ce sujet] ».
49 À cet égard, le requérant reste silencieux en ce qui concerne le reproche relatif à sa présence lors des [ confidentiel ]. En revanche, s’agissant de la réunion de rentrée du personnel du [ confidentiel ], tout en relevant avoir coordonné les préparatifs de la salle, activé les microphones et mis en place le matériel nécessaire pour ladite réunion, il admet ne pas avoir participé à cette dernière, qu’il estimait réservée au personnel éducatif. En outre, le requérant avance que son absence à ladite réunion constitue un évènement isolé. Or, même à supposer que cette absence soit un évènement isolé, ainsi que le requérant le prétend, ses arguments ne sont pas susceptibles de remettre en cause le caractère plausible de l’appréciation de la Commission selon laquelle ladite absence constituait une défaillance professionnelle du requérant.
50 Troisièmement, selon les mêmes rapports de stage et d’évaluation pour l’année 2023, « [le requérant] n’a pas été présent 8 heures par jour sur son lieu de travail, mais a quand même encodé une présence à temps plein en sysper ». Il est précisé que « [cela] a été constaté et vérifié de manière systématique sur le mois de septembre » et que, « [l]e nombre d’heures de travail effectives étant largement insuffisant (en moyenne 5 heures de présence effective par jour), [cela] ne lui a pas permis d’assister aux [ confidentiel ] prévues ni de répondre aux sollicitations des collègues qui parfois le cherch[ai]ent ou simplement de participer aux exercices d’évacuation ». De plus, le requérant n’a pas dit à sa hiérarchie « quand il souhait[ait] changer son jour de télétravail dans la semaine, convenu initialement le vendredi ». Cela aurait posé problème à plusieurs reprises et n’aurait pas permis qu’il assiste au second exercice d’évacuation programmé début octobre. En effet, il ressort des deux rapports que, au total, le requérant aura manqué deux exercices d’évacuation d’importance majeure sur le plan de la sécurité [ confidentiel ], sans donner de raison valable.
51 À cet égard, le requérant ne nie pas la véracité des reproches formulés par sa hiérarchie dans les deux rapports mentionnés au point 50 ci-dessus. En revanche, s’agissant du nombre d’heures de travail effectivement effectuées, il se borne à faire valoir que le mois de septembre 2023 coïncidait avec la rentrée scolaire de ses enfants, ce qui aurait justifié qu’il procède à une « adaptation de son emploi du temps » en quittant le travail plus tôt et en travaillant à distance ; s’agissant de la non-participation aux exercices d’évacuation, il se limite à faire valoir que, lors de ces exercices, dont il n’aurait pas été prévenu, il travaillait à distance, sans toutefois produire aucun document visant à prouver que ses jours de télétravail avaient été approuvés par sa hiérarchie.
52 Quatrièmement, le rapport de stage et le rapport d’évaluation pour l’année 2023 constatent que si le requérant « dispose de compétences techniques satisfaisantes et a maîtrisé correctement sa communication écrite, avec des mails standards à l’attention des services providers d’OIL ou de HR DS, essentiellement dans le but d’ouvrir et [de] suivre des tickets », lorsque des demandes spécifiques lui ont été adressées par les collègues, « il n’a pas pris suffisamment le temps d’aller parler avec eux pour comprendre précisément leurs besoins, alors que ce[la] figurait dans [la] description [de son poste] ». Ces mêmes rapports indiquent que « [d]es échanges trop souvent réduits, associés à des mails automatisés, ont abouti à une mauvaise compréhension des besoins initiaux exprimés et à une utilisation parfois non proportionnée des ressources, comme par exemple les services de [ confidentiel ] sollicités à mauvais escient ». Il ressort également des deux documents que le requérant « a globalement manqué d’esprit d’initiative et n’a pas cherché à comprendre comment fonctionnait l’équipe logistique », que « [l]ors des réunions, il a adopté une attitude trop passive » et que, « [e]n général[,] dans son travail, il s’est limité à réagir aux demandes d’intervention initiées par le personnel, sans prendre les devants ».
53 À cet égard, ainsi que cela a été constaté au point 43 ci-dessus, il ressort de la description du poste occupé par le requérant que, en termes de compétences, ce dernier devait notamment savoir identifier les besoins de l’utilisateur, travailler d’une manière proactive et autonome, faire preuve d’une « orientation vers la clientèle », montrer un « souci du détail et de la précision » et être capable de « travailler dans une équipe ». Il s’ensuit que le constat selon lequel le requérant n’a pas pris suffisamment le temps d’aller parler avec les collègues pour comprendre précisément leurs besoins, a globalement manqué d’esprit d’initiative et n’a pas cherché à comprendre comment fonctionnait l’équipe logistique révèle des défaillances cruciales pour le poste qu’il occupait. Il en va de même pour ce qui est du commentaire selon lequel, lors des réunions, le requérant a adopté une attitude trop passive et, en général, dans son travail, s’est limité à réagir aux demandes d’intervention initiées par le personnel, sans prendre les devants.
54 En outre, les arguments avancés par le requérant afin de remettre en cause ces constats ne suffisent pas pour établir que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en décidant, compte tenu de ces éléments, de ne pas renouveler son contrat. En effet, à cet égard, le requérant avance avoir fait preuve d’initiative et d’un esprit proactif en mettant en place le tableau de suivi Excel, en participant à des formations pour renforcer ses compétences et en suivant de près les travaux dans les aires de jeu du [ confidentiel ], signalant rapidement les problèmes grâce à une communication fluide et rapide avec l’équipe de [ confidentiel ].
55 Cependant, d’une part, il ressort du rapport d’évaluation pour l’année 2023, sans que cela soit remis en cause par le requérant, que « le tableau Excel dans lequel [ce dernier] a recensé les tickets n’a […] jamais été envoyé ou partagé avec ses collègues de l’équipe ». En outre, il ressort du même rapport, sans que cela soit contesté par le requérant, que « [l]e recensement des fenêtres et poignées défectueuses nécessitant des réparations au [ confidentiel ] […] n’a pas été documenté ni partagé avec ses collègues de l’équipe logistique et [qu’il] n’a pas été en mesure[,] lors de l’entretien d’évaluation[,] d’indiquer à quelle période il a[vait] effectué ce recensement ». D’autre part, les courriels qu’il a annexés à la requête afin de prouver sa communication rapide avec les collègues confirment la constatation figurant dans le rapport de stage et dans le rapport d’évaluation pour l’année 2023 selon laquelle il privilégiait souvent des « échanges réduits » et « réagi[ssait] aux demandes d’intervention initiées par le personnel, sans prendre les devants ».
56 Ainsi, compte tenu de tout ce qui précède, il convient de constater que, en indiquant dans la décision attaquée, telle que complétée par la décision de rejet de la réclamation, que la qualité des prestations du requérant ne correspondait pas aux standards élevés exigés des agents de son groupe de fonctions, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation.
57 Partant, le premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
b) Sur le second moyen, tiré d’une violation du devoir de sollicitude
58 Le requérant fait valoir que la Commission a violé le devoir de sollicitude qui lui incombe en ce que, en adoptant la décision attaquée et la décision de rejet de la réclamation, elle n’a pas procédé à une mise en balance de l’intérêt du service et de son intérêt. Selon le requérant, les motifs exposés dans lesdites décisions se limitent à considérer qu’il ne satisfaisait pas aux standards requis pour justifier le renouvellement de son contrat, en prenant appui sur la période comprise entre février 2023 et janvier 2024. Or, en ne prenant délibérément pas en compte les états de service précédents du requérant ayant un lien avec elle, la Commission n’aurait pas procédé à une appréciation fondée en mettant en balance l’intérêt du service avec l’intérêt de l’agent. Une mise en balance des intérêts du service et de ceux du requérant aurait dû conduire au moins à l’affecter dans un autre service ou à le maintenir à son poste. Enfin, le requérant soutient que, contrairement à ce que fait valoir la Commission, l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 11 novembre 2020, AD/ECHA (T‑25/19, non publié, EU:T:2020:536), est applicable au cas d’espèce. En effet, le fait que, dans la présente affaire, le requérant soit un agent contractuel avec une ancienneté moins importante que la partie requérante dans ladite affaire n’aurait aucune incidence sur l’application du devoir de sollicitude.
59 Par ailleurs, dans la réplique, le requérant fait valoir que le présent moyen est recevable au motif que l’irrecevabilité des arguments nouveaux en cours d’instance concerne uniquement la phase contentieuse et non la phase précontentieuse.
60 La Commission fait valoir, à titre principal, que ce moyen est irrecevable en ce qu’il n’a pas été soulevé au cours de la phase précontentieuse.
61 À titre subsidiaire, la Commission soutient que ce moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
1) Sur la fin de non-recevoir tirée d’une méconnaissance de la règle de concordance
62 À titre liminaire, il convient de rappeler que la règle de concordance entre la réclamation, au sens de l’article 91, paragraphe 2, du statut, et la requête subséquente exige, sous peine d’irrecevabilité, qu’un moyen soulevé devant le juge de l’Union l’ait déjà été dans le cadre de la procédure précontentieuse, afin que l’autorité investie du pouvoir de nomination ou l’AHCC ait été en mesure de connaître les critiques que l’intéressé formule à l’encontre de la décision contestée (voir arrêt du 13 novembre 2024, WS/EUIPO, T‑221/23, non publié, EU:T:2024:820, point 47 et jurisprudence citée).
63 Cette règle se justifie par la finalité même de la procédure précontentieuse, celle-ci ayant pour objet de permettre un règlement amiable des différends surgis entre les fonctionnaires ou agents et l’administration (voir arrêt du 25 octobre 2013, Commission/Moschonaki, T‑476/11 P, EU:T:2013:557, point 72 et jurisprudence citée). Elle vise ainsi à éviter que le fonctionnaire ou l’agent ne fasse valoir certains griefs, voire l’ensemble de ceux-ci, que lors de la phase contentieuse, avec pour conséquence que toute possibilité de règlement extrajudiciaire du litige se trouve significativement réduite. Dans ces circonstances, en effet, n’étant pas en mesure de connaître avec une précision suffisante les griefs ou desiderata de l’intéressé, l’autorité investie du pouvoir de nomination ou l’AHCC n’aura aucune possibilité de faire droit aux prétentions de celui-ci, le cas échéant, ou de proposer une solution amiable et ainsi de ne pas soumettre directement le litige à la décision du juge (voir arrêt du 21 mai 2014, Mocová/Commission, T‑347/12 P, EU:T:2014:268, point 39 et jurisprudence citée).
64 Il s’ensuit que, dans les recours en matière de fonction publique, les conclusions présentées devant le juge de l’Union ne peuvent contenir que des chefs de contestation reposant sur la même cause que celle sur laquelle reposent les chefs de contestation invoqués dans la réclamation, étant précisé que ces chefs de contestation peuvent être développés devant le juge de l’Union par la présentation de moyens et d’arguments ne figurant pas nécessairement dans la réclamation, mais s’y rattachant étroitement (voir, en ce sens, arrêt du 25 octobre 2013, Commission/Moschonaki, T‑476/11 P, EU:T:2013:557, point 73 et jurisprudence citée).
65 Par ailleurs, il convient de préciser que, d’une part, dans la mesure où la procédure précontentieuse a un caractère informel, l’administration ne doit pas interpréter les réclamations de façon restrictive, mais doit au contraire les examiner dans un esprit d’ouverture. D’autre part, l’article 91 du statut, dont résulte la règle de concordance, n’a pas pour objet de lier de façon rigoureuse et définitive la phase contentieuse éventuelle, dès lors que le recours contentieux ne modifie ni la cause ni l’objet de la réclamation (voir, en ce sens, arrêts du 9 juin 2021, Hill Mansilla/Commission, T‑575/19, non publié, EU:T:2021:324, point 52 et jurisprudence citée, et du 23 mars 2022, OT/Parlement, T‑757/20, EU:T:2022:156, points 157 et 158 et jurisprudence citée).
66 Il ressort de la jurisprudence citée aux points 62 à 65 ci-dessus qu’il est nécessaire d’examiner, en l’espèce, dans quelle mesure le second moyen du recours, tiré de la violation du devoir de sollicitude, correspond aux chefs de contestation invoqués par le requérant dans la réclamation.
67 À cet égard, il convient de rappeler que, dans la réclamation, le requérant soutient, tout d’abord, que l’entretien qui a eu lieu le 13 octobre 2023 (voir point 6 ci‑dessus) a été une source de stress dans la mesure où il a été confronté à des attaques verbales et psychologiques de la part de ses supérieurs hiérarchiques. Il avance que c’était la première fois qu’il était informé des prétendues insuffisances dans son travail. En outre, le requérant reproche en substance à la Commission d’avoir apprécié ses performances sans prendre en compte les cinq années de service qu’il avait effectuées avant la signature de son dernier contrat et pendant lesquelles ses responsables hiérarchiques avaient toujours été satisfaits de son travail, ce qui ressortirait du rapport de stage dans lequel son efficacité, ses aptitudes ainsi que son comportement auraient été évalués comme satisfaisants. Le requérant fait valoir également qu’il aurait été judicieux qu’il bénéficie d’une communication plus proactive lui permettant de rectifier des aspects de sa performance si ceux-ci ne correspondaient pas aux standards requis.
68 Ensuite, le requérant soulève des arguments visant à démontrer qu’il a accompli les tâches qui lui avaient été confiées avec rigueur et que sa performance a surpassé les attentes inhérentes à ses fonctions.
69 Enfin, le requérant soutient que la décision attaquée a été prise de manière hâtive, sans transparence et sans respect de la procédure légale.
70 Dès lors, s’il ne ressort pas de la réclamation que le requérant a expressément soulevé, dans le cadre d’un chef de contestation, une violation du devoir de sollicitude, il n’en demeure pas moins qu’il a reproché à la Commission un défaut de mise en balance entre ses intérêts et ceux du service en ce que cette dernière n’aurait pas pris en compte ses états de service précédant le contrat d’agent contractuel (voir point 67 ci-dessus).
71 Ainsi, il convient de constater que, interprétés dans un esprit d’ouverture, une partie des griefs figurant dans la réclamation se rattachent étroitement à ceux développés dans la requête au soutien du second moyen. En effet, dans le cadre de son second moyen, le requérant fait valoir que la Commission, dans la décision attaquée, a violé son devoir de sollicitude au motif qu’elle n’a pas procédé à une mise en balance de l’intérêt du service et de son intérêt. En particulier, en ne prenant pas en compte les états de service précédant le contrat d’agent contractuel ayant un lien avec elle, la Commission n’aurait pas procédé à une appréciation fondée de ses performances en mettant en balance l’intérêt du service avec l’intérêt de l’agent.
72 Partant, bien qu’une partie des arguments avancés par le requérant dans la requête ne correspondent pas exactement à ceux qu’il a avancés dans la réclamation, il n’en demeure pas moins qu’ils reposent sur un même objet, à savoir la contestation de la décision attaquée telle que complétée par la décision de rejet de la réclamation, et une cause identique, à savoir l’absence de mise en balance de l’intérêt du service avec l’intérêt du requérant dans l’appréciation de ses performances, en ce que la Commission n’a pas pris en compte les états de service précédant le contrat d’agent contractuel ayant un lien avec elle.
73 Dans ce contexte, la seule absence de qualification juridique des griefs invoqués au sein de la réclamation ne saurait, au sens de la jurisprudence citée au point 62 ci-dessus, conduire à une violation, en l’espèce, de la règle de concordance.
74 Il s’ensuit que la fin de non-recevoir soulevée par la Commission doit être rejetée.
2) Sur le bien-fondé du second moyen
75 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’autorité compétente est tenue, lorsqu’elle statue à propos de la situation d’un agent, de prendre en considération l’ensemble des éléments qui sont susceptibles de déterminer sa décision, c’est-à-dire non seulement l’intérêt du service, mais aussi, notamment, celui de l’agent concerné. Cela résulte, en effet, du devoir de sollicitude de l’administration, qui reflète l’équilibre des droits et obligations réciproques que le statut et, par analogie, le RAA ont créé dans les relations entre l’autorité publique et ses agents (voir arrêt du 24 avril 2017, HF/Parlement, T‑584/16, EU:T:2017:282, point 119 et jurisprudence citée).
76 Appliqué à une décision relative au renouvellement éventuel du contrat d’un agent contractuel, le devoir de sollicitude impose ainsi à l’autorité compétente, lorsqu’elle statue, de procéder à une mise en balance de l’intérêt du service et de l’intérêt de l’agent (voir, en ce sens, arrêt du 11 novembre 2020, AD/ECHA, T‑25/19, non publié, EU:T:2020:536, point 160).
77 En l’espèce, dans la mesure où le manquement au devoir de sollicitude repose, en substance, sur la prétendue absence de prise en compte de toute la période pendant laquelle le requérant occupait des fonctions au sein de l’OIL (voir points 70 à 72 ci-dessus), il convient de souligner qu’il ressort de la motivation de la décision de rejet de la réclamation, qu’il convient de prendre en compte pour apprécier la légalité de la décision attaquée, que la Commission a tenu compte de l’intérêt du requérant en expliquant la raison pour laquelle, dans l’appréciation de ses performances, elle ne pouvait pas prendre en considération toute ladite période, à savoir celle couverte par les différents contrats d’intérim et par le contrat d’agent temporaire du requérant.
78 En outre, le requérant a été invité, dans la décision attaquée, à communiquer ses commentaires à l’AHCC sur la mesure envisagée à son égard. Toutefois, il n’a pas donné suite à cette invitation et a ainsi renoncé à faire valoir son intérêt au renouvellement de son contrat d’agent contractuel (voir, par analogie, arrêt du 12 février 2020, WD/EFSA, T‑320/18, non publié, EU:T:2020:45, point 136). Dès lors, le requérant ne saurait reprocher à la Commission de ne pas avoir mis en balance son intérêt avec celui du service.
79 Par ailleurs, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel une mise en balance des intérêts du service et de ceux de l’agent aurait dû a minima conduire sinon à le maintenir à son poste, du moins à le transférer vers un service dans lequel il avait toujours donné satisfaction (voir point 58 ci-dessus), il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, le devoir de sollicitude ne saurait aller jusqu’à entraîner, pour l’autorité compétente, une obligation d’examiner, de manière préalable, la possibilité de réaffecter l’agent à de nouvelles tâches et fonctions avant de décider de ne pas renouveler son contrat (voir arrêt du 22 mars 2018, HJ/EMA, T‑579/16, non publié, EU:T:2018:168, point 89 et jurisprudence citée).
80 Il s’ensuit que le devoir de sollicitude n’imposait pas à la Commission d’examiner, préalablement à l’adoption de la décision attaquée, la possibilité de réaffecter le requérant à de nouvelles tâches et fonctions.
81 Partant, il convient de constater que la Commission n’a pas violé le devoir de sollicitude et, par conséquent, d’écarter le second moyen comme étant non fondé, ainsi que de rejeter les conclusions en annulation.
2. Sur les conclusions visant à obtenir la réintégration au sein de la Commission
82 Par son troisième chef de conclusions, contesté par la Commission, le requérant demande sa réintégration au sein de la Commission.
83 À cet égard, il suffit de rappeler que, selon la jurisprudence, le juge de l’Union ne saurait en principe adresser des injonctions à une institution, un organe ou un organisme de l’Union sans empiéter sur les prérogatives de l’autorité administrative (voir arrêts du 2 octobre 2014, Strack/Commission, C‑127/13 P, EU:C:2014:2250, point 145 et jurisprudence citée, et du 9 septembre 2020, P. Krücken Organic/Commission, T‑565/18, non publié, EU:T:2020:395, point 23 et jurisprudence citée). Ce principe s’applique, en principe, tant dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur l’article 91 du statut et sur l’article 270 TFUE (arrêt du 5 décembre 2017, Spadafora/Commission, T‑250/16 P, non publié, EU:T:2017:866, point 48) que dans le cadre d’un recours en indemnité par lequel un requérant demande la condamnation de l’institution défenderesse à prendre des mesures déterminées en vue de réparer le préjudice allégué (voir, en ce sens, ordonnances du 14 janvier 2004, Makedoniko Metro et Michaniki/Commission, T‑202/02, EU:T:2004:5, point 53, et du 17 décembre 2008, Portela/Commission, T‑137/07, non publiée, EU:T:2008:589, point 46).
84 Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter le troisième chef de conclusions pour cause d’incompétence.
3. Sur les conclusions indemnitaire s
85 Au soutien des quatrième, cinquième et sixième chefs de conclusions, le requérant sollicite, à défaut de sa réintégration au sein de la Commission (voir point 82 ci-dessus), l’indemnisation des préjudices matériel et moral ainsi que du préjudice consistant en une perte de chance qu’il allègue avoir subis du fait de l’adoption de la décision attaquée et de la décision de rejet de la réclamation.
86 En premier lieu, le requérant soutient avoir subi, du fait de la décision attaquée, un préjudice matériel correspondant au montant des salaires et des avantages auxquels il aurait eu droit jusqu’à l’exécution du jugement s’il avait encore été employé, majoré des intérêts pour le retard de paiement. Le requérant évalue le préjudice matériel à 48 697,88 euros, correspondant à 12 mois de traitement brut, y compris les contributions au régime des pensions.
87 Par ailleurs, en raison des illégalités commises par la Commission, le requérant estime avoir subi une perte de chance sérieuse et élevée d’obtenir le renouvellement de son contrat, qu’il évalue à hauteur de 90 % de ses traitements bruts, y compris les contributions au régime des pensions, sur la base des éléments figurant dans sa fiche de salaire du mois de janvier 2024, sur une durée raisonnable.
88 En second lieu, le requérant estime avoir subi un préjudice moral, qu’il évalue ex æquo et bono à 10 000 euros, en raison du fait que les illégalités commises par la Commission lui ont causé un stress important, de l’anxiété et un fort sentiment d’injustice, de manque de respect et de diffamation, qui ont nui à sa santé physique et psychologique ainsi qu’à sa dignité et à sa réputation professionnelle de manière irréversible, compte tenu du stade actuel de sa carrière et de son âge. Par ailleurs, le requérant rappelle qu’il a connu une dépression à l’issue de l’annonce inattendue du non-renouvellement de son contrat de travail et qu’il a également subi une opération médicale du fait de son « travail en déménagement qu’on lui a imposé de faire ». Selon le requérant, l’annulation de la décision attaquée et de la décision de rejet de la réclamation ne suffit pas à réparer les atteintes portées à sa dignité, à sa réputation, à son estime de soi et à sa santé.
89 La Commission conteste les arguments du requérant.
90 À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice matériel ou moral doivent être rejetées lorsqu’elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont elles-mêmes été rejetées soit comme étant irrecevables, soit comme étant non fondées (voir arrêt du 26 avril 2023, CV/Commission, T‑20/18, non publié, EU:T:2023:220, point 87 et jurisprudence citée).
91 En l’espèce, il y a lieu de constater que les conclusions indemnitaires présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation. En effet, le requérant demande la réparation d’un préjudice matériel, y compris la perte de chance d’obtenir le renouvellement de son contrat, et d’un préjudice moral, dont il considère qu’ils ont été causés, en substance, par la seule décision attaquée.
92 Ainsi, le requérant ne se prévaut, au soutien de ses conclusions indemnitaires, que des chefs d’illégalité qu’il a exposés au soutien de ses conclusions tendant à l’annulation de la décision attaquée.
93 En conséquence, les conclusions en annulation ayant été rejetées comme non fondées, les conclusions indemnitaires doivent l’être également.
94 Partant, il convient de rejeter l’intégralité du recours.
IV. Sur les dépens
95 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
96 En l’espèce, le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens et ceux de la Commission, conformément aux conclusions de celle-ci.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (dixième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) EZ est condamné aux dépens.
Porchia
Nihoul
Verschuur
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 juin 2025.
Signatures
* Langue de procédure : le français.
1 Données confidentielles occultées.