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COMPROJECTO, PROJECTOS E CONSTRUÇÕES, LDA. v. PORTUGAL

Doc ref: 46273/18 • ECHR ID: 001-228397

Document date: September 19, 2023

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COMPROJECTO, PROJECTOS E CONSTRUÇÕES, LDA. v. PORTUGAL

Doc ref: 46273/18 • ECHR ID: 001-228397

Document date: September 19, 2023

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QUATRIÈME SECTION

DÉCISION

Requête n o 46273/18 COMPROJECTO, PROJECTOS E CONSTRUÇÕES, LDA. contre le Portugal

La Cour européenne des droits de l’homme quatrième section, siégeant le 19 septembre 2023 en un comité composé de :

Tim Eicke, président , Branko Lubarda, Ana Maria Guerra Martins , juges , et de Ilse Freiwirth, greffière adjointe de section ,

Vu :

la requête n o 46273/18 dirigée contre la République portugaise et dont une société de cet État, Comprojecto, Projectos e Construções, Lda. (« la requérante ») constituée en 1980 et siégeant à Lisbonne, représentée par M. P.E.M. Gomes de Azevedo, a saisi la Cour le 24 septembre 2018 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »),

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

OBJET DE l’AFFAIRE

1. La requête concerne le manquement allégué des autorités internes à sanctionner l’atteinte au droit de la requérante au respect de ses biens. La requérante invoque les articles 6 § 1, 7 § 1, 13 et 14 de la Convention et l’article 1 du Protocole n o 1 à la Convention.

2. La requérante est une société travaillant dans le secteur de la construction et des travaux publics. Entre le 13 septembre 2005 et le 14 juin 2009, M., son directeur financier s’appropria 1 061 820 Euros (« EUR ») de l’entreprise en effectuant des virements bancaires du compte que cette dernière détenait à la banque B. vers son compte personnel et celui de sa conjointe. La requérante déposa une plainte contre M. et introduisit une action en responsabilité civile contre la banque B. et les gestionnaires de son compte bancaire, en les accusant d’avoir violé la convention bancaire qui les liait en permettant au directeur financier d’effectuer les opérations bancaires litigieuses au moyen de cartes bancaires alors qu’il n’y était pas autorisé. Elle déposa aussi une plainte contre la banque B. devant la Banque du Portugal.

3 . Par un arrêt du 14 juin 2012 de la cour d’appel de Lisbonne, la requérante fut déboutée de l’action en responsabilité civile qu’elle avait engagée contre la banque B. et les gestionnaires de son compte. La cour d’appel estima que ces derniers n’étaient pas responsables des préjudices matériels qu’elle avait subi en raison des actes commis par M. Par un arrêt du 14 juillet 2016, le pourvoi en cassation de la requérante devant la Cour suprême fut déclaré irrecevable. Par un arrêt du comité de trois juges du Tribunal constitutionnel, son recours constitutionnel fut déclaré irrecevable pour tardiveté.

4. Le 18 août 2014, en tenant notamment compte de l’arrêt qui avait été rendu par la cour d’appel de Lisbonne dans le cadre de l’action en responsabilité civile engagée par la requérante contre la banque B. et ses gestionnaires de compte (paragraphe 3 ci-dessus), la Banque du Portugal classa sans suite la plainte que la requérante avait déposée devant elle. Elle jugea qu’aucune infraction administrative n’avait été commise par les visés par rapport aux faits litigieux.

5 . Quant à la procédure pénale, par un arrêt de la cour d’appel de Lisbonne du 24 février 2015, M. fut condamné à quatre ans d’emprisonnement pour fraude informatique. Le 24 septembre 2015, le pourvoi en cassation introduit par la requérante devant la Cour suprême fut déclaré irrecevable.

6 . À une date non spécifiée, en se fondant sur l’article 696 b) du code de procédure civile (« CPC »), la requérante forma un recours en révision en vue de la réouverture de la procédure civile qu’elle avait engagée contre la banque B. Elle soutenait, à l’appui de son recours, que des témoins de la défense avaient fait de fausses déclarations au cours de l’audience. Par un arrêt du 2 mars 2015, la cour d’appel de Lisbonne rejeta la demande au motif qu’elle était manifestement mal fondée.

7 . À une date non précisée, la requérante forma un nouveau recours en révision en vue de la réouverture de la procédure civile contre la banque B. En se prévalant de l’article 696 f) du CPC, elle alléguait que l’arrêt du 14 juillet 2016 qui avait été rendu par la Cour suprême (paragraphe 3 ci ‑ dessus) était inconciliable avec l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne (« CJUE ») Safe Interenvios, SA c. Liberbank, SA et autres du 10 mars 2016, (affaire C ‑ 235/14, EU:C:2016:154). Par un arrêt du 23 mars 2018, porté à la connaissance de la requérante le 30 mars 2018, la Cour suprême n’autorisa pas la révision au motif, d’une part, que l’arrêt de la CJUE en question portait sur une demande de décision préjudicielle introduite par l’Audiencia Provincial de Barcelona et, d’autre part, ne concernait pas la requérante, celle-ci ne pouvant dès lors pas se prévaloir de l’article 696 f) du CPC.

8 . Invoquant les articles 6 § 1, 7 § 1, 13 et 14 de la Convention, la requérante se plaint que la banque du Portugal ne lui pas remis des documents qui auraient permis de prouver que la banque B. n’avait pas respecté la convention de compte bancaire qu’ils avaient conclue et qu’elle était responsable du préjudice qu’elle a subi en raison des infractions commises par son directeur financier. Elle soutient que son droit à un procès équitable a été méconnu.

9 . En outre, elle plaide qu’en ne sanctionnant pas la banque B., les autorités internes ont manqué aux obligations positives qui leur incombaient, au titre de l’article 1 du Protocole n o 1 à la Convention, pour protéger le capital qu’elle avait déposé dans la banque B.

APPRÉCIATION DE LA COUR

10. La Cour rappelle que le délai de six mois prévu par l’article 35 § 1 de la Convention, tel qu’il était en vigueur à l’époque des faits, vise à assurer la sécurité juridique en garantissant que les affaires qui soulèvent des questions au regard de la Convention soient examinées dans un délai raisonnable et que les décisions passées ne soient pas indéfiniment susceptibles d’être remises en cause. Les principes généraux à cet égard sont exposés dans l’arrêt Lopes de Sousa Fernandes c. Portugal ([GC], n o 56080/13, §§ 130-131, 19 décembre 2017), auxquels la Cour se réfère.

11. Pour les besoins de la présente espèce, la Cour rappelle également que, en règle générale, les demandes de révision d’une procédure ne sont pas des recours effectifs et que, en tant que telles, elles n’interrompent pas le cours du délai de six mois, sauf dans le cas où elles constituent la seule voie de recours ouverte au requérant dans les circonstances de l’espèce ( Savickis et autres c. Lettonie [GC], n o 49270/11, § 132, 9 juin 2022, et les nombreuses références qui y sont citées).

12. Une décision rejetant une demande de réouverture d’une procédure ne constitue pas une « décision définitive » aux fins de l’article 35 § 1 de la Convention et ne peut être considérée comme le point de départ du délai de six mois. En revanche, la réouverture de la procédure ou le réexamen d’une décision définitive interrompt l’écoulement du délai de six mois par rapport à la procédure initiale ou à la décision définitive, mais uniquement en ce qui concerne les questions soulevées sur le terrain de la Convention qui ont fondé le réexamen ou la réouverture et qui ont été examinées par l’organe de recours extraordinaire. Enfin, si un recours extraordinaire n’a pas abouti à la réouverture de la procédure initiale mais si les juridictions nationales ont néanmoins pu examiner l’essentiel des questions de droits de l’homme ensuite portées devant la Cour par le requérant et si elles les ont traitées, le délai de six mois doit être considéré comme ayant recommencé à courir ( Savickis et autres , précité, § 133).

13. La Cour note que la présente requête a été introduite le 24 septembre 2018. Elle constate ensuite que, à l’exception du deuxième recours en révision (paragraphe 7 ci-dessus), toutes les procédures engagées au niveau interne par la requérante ont été conclues plus de six mois avant cette date. En effet, la procédure en responsabilité civile contre la banque B. s’est terminée par un arrêt du 14 juin 2012, dès lors qu’aucun recours ordinaire n’était alors ouvert à la requérante. La procédure devant la Banque du Portugal s’est terminée le 18 août 2014 et la procédure pénale s’est achevée par un arrêt condamnatoire de la cour d’appel de Lisbonne du 24 février 2015, qui n’était pas susceptible d’appel (paragraphes 3-5 ci-dessus). Le premier recours en révision introduit par la requérante devant la cour d’appel de Lisbonne a quant à lui été conclu par un arrêt de rejet du 2 mars 2015 (paragraphe 6 ci-dessus).

14. En venant au deuxième recours en révision, la Cour note qu’il a été tranché par un arrêt du 23 mars 2018 de la Cour suprême, soit dans le délai de six mois, en vigueur au moment des faits. Par cette décision, la Cour suprême a rejeté la demande de la requérante tendant à la réouverture de la procédure civile contre la banque B (paragraphe 7 ci-dessus). La Cour relève que la Cour suprême ne s’est penchée sur aucune des questions que la requérante soulève devant la Cour (paragraphes 8-9 ci-dessus). En l’occurrence, elle s’est limitée à constater que l’arrêt rendu par la CJUE cité par la requérante à l’appui de sa demande de révision portait sur une demande de décision préjudicielle introduite par l’Audiencia Provincial de Barcelona et ne concernait pas la requérante. La Cour suprême a dès lors conclu que cette dernière ne pouvait pas se prévaloir de l’article 696 f) du CPC (paragraphe 7 ci-dessus). Elle ne s’est donc pas penchée sur le fond des questions. Partant, la Cour estime que ce recours en révision n’a pas fait courir de nouveau le délai de six mois par rapport aux griefs que la requérante soulève devant elle.

15. Au vu de ces constatations, la Cour estime que la requête doit être rejetée pour tardiveté en application de l’article 35 §§ 1 à 4 de la Convention.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Déclare la requête irrecevable.

Fait en français puis communiqué par écrit le 12 octobre 2023.

Ilse Freiwirth Tim Eicke Greffière adjointe Président

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