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Urteil Des Gerichts (Siebte Kammer) Vom 19. November 2025.

+pharma arzneimittel GmbH gegen Amt der Europäischen Union für geistiges Eigentum.

• 62024TJ0645 • ECLI:EU:T:2025:1051

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Urteil Des Gerichts (Siebte Kammer) Vom 19. November 2025.

+pharma arzneimittel GmbH gegen Amt der Europäischen Union für geistiges Eigentum.

• 62024TJ0645 • ECLI:EU:T:2025:1051

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

19 novembre 2025 ( * )

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative PlusQuam +PHARMA – Marque nationale verbale antérieure +PHARMA – Motifs relatifs de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement 2017/1001 – Caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure – Renommée – Preuve de l’usage »

Dans l’affaire T‑645/24,

+pharma arzneimittel GmbH, établie à Graz (Autriche), représentée par M es L. Wiltschek et D. Plasser, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. M. Eberl, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

PlusQuam Pharma, SL, établie à Badajoz (Espagne),

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé, lors des délibérations, de M me K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, MM. E. Buttigieg et I. Dimitrakopoulos (rapporteur), juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, +pharma arzneimittel GmbH, demande l’annulation et la réformation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 7 novembre 2024 (affaire R 1217/2024-2) (ci-après la « décision attaquée »).

Antécédents du litige

2 Le 11 juillet 2022, l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO, PlusQuam Pharma, SL, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

3 La marque demandée désignait les produits relevant des classes 3 et 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

– classe 3 : « Produits cosmétiques » ;

– classe 5 : « Produits pharmaceutiques et parapharmaceutiques ; produits nutricosmétiques ; additifs nutritionnels à usage médical ; compléments alimentaires à usage médical ; compléments alimentaires minéraux ; intégrateurs alimentaires et produits diététiques à usage médical ; substances diététiques à usage médical ».

4 Le 13 octobre 2022, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus.

5 L’opposition était fondée sur la marque verbale autrichienne antérieure +PHARMA, désignant des produits relevant de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques et vétérinaires ; produits d’hygiène à usage médical, aliments diététiques à usage médical, aliments pour bébés ; emplâtres, matériel pour pansements ; désinfectants ».

6 Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7 À la suite de la demande formulée par l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO, celui-ci a invité la requérante à apporter la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure.

8 Le 17 mai 2024, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité, au motif qu’il n’existait pas de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 et que les conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, de ce même règlement n’étaient pas remplies.

9 Le 17 juin 2024, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

10 Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours dans son ensemble. Elle a confirmé la décision de la division d’opposition, selon laquelle il n’existait pas de risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. À cet égard, lors de son appréciation globale du risque de confusion, elle a notamment tenu compte du caractère distinctif faible de la marque antérieure, ayant considéré que le caractère distinctif accru par l’usage n’avait pas été démontré. En outre, selon la chambre de recours, la marque antérieure était dépourvue de renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, de ce même règlement, de sorte que cette disposition n’était pas applicable en l’espèce.

Conclusion des parties

11 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– réformer la décision attaquée en accueillant l’opposition dans son intégralité ;

– à titre subsidiaire, annuler la décision attaquée ;

– condamner l’EUIPO au remboursement des frais exposés devant le Tribunal et devant la chambre de recours ;

– condamner « l’intervenante » aux dépens de la procédure devant la division d’opposition.

12 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours ;

– condamner la requérante aux dépens exposés par l’EUIPO dans le cas où une audience serait organisée.

En droit

13 La requérante avance deux moyens, le premier tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 et le second tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 5, de ce même règlement.

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’ article 8 , paragraphe 1 , sous b), du règlement 2017/1001

14 Selon la requérante, en substance, c’est à tort que la chambre de recours a considéré, en l’espèce, qu’il n’existait pas de risque de confusion. Ce faisant, elle aurait fait une application incorrecte des principes pertinents et aurait erronément apprécié les facteurs à prendre en considération. En particulier, la chambre de recours aurait commis des erreurs dans l’appréciation du caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure.

15 Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), de ce règlement, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre.

16 Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

17 Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

18 Il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union européenne [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

19 En l’espèce, la chambre de recours a considéré que le territoire pertinent était celui de l’Autriche, étant donné que la marque antérieure était un enregistrement autrichien. Les produits en conflit seraient destinés au grand public ainsi qu’aux consommateurs disposant d’une expertise ou de connaissances professionnelles spécifiques. Le niveau d’attention varie, selon elle, « de moyen à élevé ». Ces éléments n’ont pas été contestés par les parties.

20 Eu égard aux allégations de la requérante, le Tribunal estime opportun d’examiner, tout d’abord, l’appréciation de la chambre de recours portant sur l’absence de caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure.

21 À cet égard, ainsi qu’il découle du considérant 11 du règlement 2017/1001, l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs, et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

22 L’existence d’un caractère distinctif élevé, en raison de la connaissance qu’a le public d’une marque sur le marché, suppose nécessairement que cette marque soit connue d’au moins une partie significative du public concerné, sans qu’elle doive nécessairement posséder une renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001. Il ne saurait être indiqué d’une façon générale, par exemple en recourant à des pourcentages déterminés relatifs au degré de connaissance qu’a le public de la marque dans les milieux concernés, qu’une marque a un caractère distinctif élevé. Néanmoins, il y a lieu de reconnaître une certaine interdépendance de la connaissance qu’a le public d’une marque et du caractère distinctif de celle-ci, en ce sens que plus la marque est connue du public ciblé, plus le caractère distinctif de cette marque est renforcé. Pour examiner si une marque jouit d’un caractère distinctif élevé en raison de la connaissance qu’en a le public, il convient de prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage, l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie les produits ou les services comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations des chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles [voir, en ce sens, arrêt du 12 juillet 2006, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Johnson’s Veterinary Products (VITACOAT), T‑277/04, EU:T:2006:202, points 34 et 35 et jurisprudence citée].

23 En l’espèce, aux points 81 à 91 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu à l’absence de risque de confusion en se fondant notamment sur le caractère distinctif intrinsèque faible de la marque antérieure par rapport aux produits en cause. À cet égard, elle a considéré, aux points 59 à 80 de la décision attaquée, que le caractère distinctif accru de cette marque n’avait pas été prouvé à l’égard du public pertinent, et donc qu’il convenait de tenir compte seulement du caractère distinctif intrinsèque de ladite marque.

24 En premier lieu, s’agissant du caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, aux points 37 à 40 de la décision attaquée, d’une part, la chambre de recours a considéré que le signe « + » faisait référence à l’idée de quelque chose de supplémentaire ou au fait que les produits pertinents offraient quelque chose de supplémentaire et qu’il serait généralement perçu comme un élément élogieux ou augmentatif qui indiquait généralement une valeur ou une quantité supérieure.

25 D’autre part, en ce qui concerne l’élément verbal « pharma », la chambre de recours a souligné qu’il serait compris comme un préfixe indiquant un médicament. En outre, ce terme était, selon elle, une abréviation courante utilisée dans l’industrie pharmaceutique, donnant au consommateur l’impression que les produits pertinents étaient fabriqués par des entreprises pharmaceutiques ou bénéficient des résultats de la recherche pharmaceutique.

26 Dans le même temps, la chambre de recours a observé que, en raison de la présomption de validité de la marque antérieure, conformément à l’arrêt du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI (C‑196/11 P, EU:C:2012:314, point 40), celle-ci n’a pas été considérée comme purement descriptive ou comme dépourvue de caractère distinctif, mais, tout au long de l’examen, comme étant faiblement distinctive, ce qui signifierait qu’elle était dotée d’un degré minimal de caractère distinctif.

27 En second lieu, s’agissant du caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure, aux points 59 à 80 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que c’était à juste titre que la division d’opposition avait conclu que celui-ci n’avait pas été démontré.

28 Lors de son examen du caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure, la chambre de recours a écarté la grande majorité des éléments de preuve présentés par la requérante, en considérant, en substance, que ceux-ci comportaient des représentations altérant le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, et donc ne démontraient pas l’usage de cette marque.

29 La requérante conteste l’appréciation par la chambre de recours du caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure, en soutenant que cette appréciation aurait dû se fonder sur l’ensemble des éléments de preuve présentés.

30 Premièrement, l’ajout, lors de l’usage de la marque antérieure, de dénominations scientifiques de principes actifs pharmaceutiques ne modifierait pas le caractère distinctif de celle-ci.

31 Deuxièmement, selon la requérante, l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les éléments de stylisation et les couleurs utilisés altèrent le caractère distinctif de la marque antérieure est contraire à la jurisprudence.

32 L’EUIPO conteste les allégations de la requérante. Tout d’abord, il avance que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure est extrêmement faible, avec, pour conséquence, qu’il serait aisément altéré par l’adjonction d’un élément même faiblement distinctif. Ensuite, l’EUIPO soutient que les éléments de preuve produits par la requérante pour établir le caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure présentent une forme altérée de celle-ci par rapport à celle sous laquelle elle a été enregistrée. Enfin, s’agissant des différentes annexes présentées par la requérante, portant sur son chiffre d’affaires et sur sa part de marché en Autriche, l’EUIPO avance, en substance, qu’elles ont une faible valeur probante.

33 À titre liminaire, il convient de relever qu’il ressort de la jurisprudence que le titulaire d’une marque enregistrée peut, aux fins d’établir le caractère distinctif particulier et la renommée de celle-ci, se prévaloir de preuves de son utilisation sous une forme différente, pourvu que le public concerné continue à percevoir les produits en cause comme provenant de la même entreprise [voir arrêt du 5 mai 2015, Spa Monopole/OHMI – Orly International (SPARITUAL), T‑131/12, EU:T:2015:257, point 33 et jurisprudence citée].

34 Le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque telle qu’enregistrée requiert un examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque [voir, par analogie, arrêts du 1 er mars 2023, Transgourmet Ibérica/EUIPO – Aldi (Gourmet), T‑102/22, non publié, EU:T:2023:100, point 73, et du 19 mars 2025, e-dialog/EUIPO – Dialoga Servicios Interactivos (Dialoga), T‑1075/23, non publié, EU:T:2025:311, point 45 et jurisprudence citée].

35 Il ressort également de la jurisprudence que le fait que la marque enregistrée soit parfois utilisée avec des éléments additionnels et parfois sans de tels éléments peut constituer l’un des critères permettant de conclure à l’absence d’altération du caractère distinctif [voir arrêt du 19 octobre 2022, Castel Frères/EUIPO – Shanghai Panati (Représentation de caractères chinois), T‑323/21, non publié, EU:T:2022:650, point 23 et jurisprudence citée].

36 Enfin, selon la jurisprudence, la protection qui découle de l’enregistrement d’une marque verbale porte sur le mot indiqué dans la demande d’enregistrement, et non pas sur les aspects graphiques ou stylistiques particuliers que cette marque pourrait éventuellement revêtir. En outre, la représentation concrète d’une marque verbale n’est généralement pas de nature à modifier le caractère distinctif de ladite marque telle qu’enregistrée [voir arrêts du 13 février 2007, Ontex/OHMI – Curon Medical (CURON) , T‑353/04, non publié, EU:T:2007:47, point 74 et jurisprudence citée, et du 22 juin 2022, Beveland/EUIPO – Super B (BUCANERO) , T‑29/21, non publié, EU:T:2022:388, point 37 et jurisprudence citée].

37 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, dans la décision attaquée, que la plupart des éléments de preuve présentés par la requérante ne constituait pas des preuves de l’utilisation de la marque antérieure, de sorte que ces derniers ne permettaient pas d’établir que celle-ci possédait un caractère distinctif accru par l’usage qui en a été fait.

38 En premier lieu, en ce qui concerne les annexes 1 à 9, portant sur diverses publicités de médicaments, présentées dans des magazines spécialisés pour médecins et autres professionnels du secteur de la santé entre octobre 2021 et septembre 2022, les publicités qui y sont contenues comportent, en haut de la page, une indication composée selon une approche-type combinant la mention de la substance active d’un médicament et l’apposition de l’élément « +pharma » (par exemple, Azithromycin +pharma, Venlafaxin +pharma, ou Sildenafil +pharma). À titre d’exemple, de telles combinaisons se présentent comme suit :

ou

39 Ces éléments permettent à eux seuls de constater l’utilisation de la marque antérieure sous une forme dépourvue de modifications graphiques conséquentes, auprès de l’indication de la substance active du médicament en cause. Or, ainsi que le relève la requérante, le public professionnel percevra immédiatement l’indication d’une substance active comme faisant référence à un médicament et, par conséquent, considérera que la partie suivante, « +pharma », constitue une indication de l’origine du produit pharmaceutique concerné. Ce public identifiera, dès lors, la marque antérieure.

40 À cet égard, il y a lieu de souligner, en l’espèce, l’importance particulière qui doit être accordée au public professionnel dans le domaine de la santé, directement visé par les publicités telles que les éléments de preuve mentionnés au point 38 ci-dessus. En effet, même à considérer qu’une partie importante des achats des médicaments en cause soit effectuée par le personnel des services centraux d’achats, ceux-ci n’agissent, en général, que pour donner suite à une commande précise de la part de professionnels de santé, qu’il s’agisse de médecins, ou de pharmaciens, ou, à tout le moins, sous leur contrôle [voir, en ce sens, arrêts du 10 septembre 2014, Micrus Endovascular/OHMI – Laboratórios Delta (DELTA), T‑218/12, non publié, EU:T:2014:760, point 50, et, quant au public ciblé spécialisé en matière médicale, du 5 mars 2003, Alcon/OHMI – Dr. Robert Winzer Pharma (BSS) T‑237/01, EU:T:2003:54, point 42].

41 En deuxième lieu, en ce qui concerne les annexes 11 à 17, portant sur des publicités directes adressées, en 2021 et 2022, à des professionnels du secteur de la santé, ainsi qu’il ressort du tableau inclus dans la lettre du 24 mai 2023 de M. D. P. à l’EUIPO, elles incluent, outre les titres de lettres publicitaires formés selon l’ approche-type décrite au point 38 ci-dessus, d’une part, des images d’emballages de médicaments sur lesquels l’élément « +pharma » est apposé visiblement auprès de la substance active et, d’autre part, des informations concrètes qui font expressément référence à la requérante. Or, dans de telles circonstances, il convient de considérer que l’ensemble de ces éléments est pertinent pour l’appréciation du caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure, puisque le public professionnel percevra l’élément « +pharma » comme constituant une indication de l’origine des produits pharmaceutiques concernés.

42 À cet égard, le fait qu’une autre marque figurative comportant une croix rappelant deux pansements interposés soit également apposée plus bas sur les mêmes publicités n’invalide pas la conclusion selon laquelle les éléments de preuve présentés par la requérante doivent être considérés comme pertinents pour l’analyse du caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 33 à 36 ci-dessus. En effet, le public professionnel percevra la marque antérieure dans l’intitulé des publicités en cause ainsi que sur les différents emballages de médicaments présentés. Partant, les produits en cause seront toujours considérés comme provenant de l’entreprise de la requérante.

43 En troisième lieu, en ce qui concerne les produits de marketing figurant dans les annexes 25 et 27, 30 et 31, le public professionnel du secteur de la santé reconnaîtra également la marque antérieure sur ces documents, qui comportent un « + » en bleu ou en blanc, entouré d’un rond et suivi de l’élément « pharma ». En effet, l’écart par rapport à la marque antérieure telle qu’enregistrée n’est, dans ces cas, que minime et ne saurait être considéré comme modifiant son caractère distinctif. Il s’agit des éléments de preuve présentés comme suit :

44 Comme le soutient la requérante à juste titre, dans ces éléments de preuve, l’élément « pharma » sera perçu comme une marque verbale, en raison de l’utilisation d’une police de caractères relativement typique et lisible. De même, l’élément initial de la marque antérieure « + » demeure facilement perceptible, même si une couleur lui est attribuée. Lorsqu’il est entouré d’un rond bleu, celui-ci constitue un élément ornemental n’altérant pas le caractère distinctif de la marque antérieure.

45 En quatrième lieu, en ce qui concerne les emballages de médicaments utilisés sur le territoire pertinent présentés dans les annexes 35 à 38 et 40, ceux-ci comportent la dénomination d’une substance active, à laquelle s’ajoute la marque antérieure constituée de l’élément « + », représenté en différentes couleurs, dans un rond de différentes couleurs, et de l’élément « pharma », par exemple comme suit :

46 Il s’agit, contrairement à l’appréciation de la chambre de recours, d’éléments de preuve d’un usage ne modifiant pas le caractère distinctif de la marque antérieure et devant, ainsi, être pris en considération dans l’appréciation du caractère distinctif accru par l’usage de celle-ci, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 33 à 36 ci-dessus.

47 Premièrement, dans ces circonstances, il convient de considérer que les éléments de preuve repris aux points 38 à 46 ci-dessus devaient être pris en compte, dans leur ensemble, comme étant susceptibles de démontrer l’usage de la marque antérieure aux fins de l’appréciation de l’éventuelle acquisition d’un caractère distinctif accru par celle-ci. D’ailleurs, une telle conclusion n’est pas invalidée, contrairement à ce que prétend l’EUIPO, par le prétendument faible caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure. En effet, celle-ci est reprise entièrement dans les multiples variantes dont l’utilisation a été établie en l’espèce, dans lesquelles elle demeure facilement et immédiatement identifiable (voir, en ce sens, arrêt du 19 mars 2025, Dialoga, T‑1075/23, non publié, EU:T:2025:311, point 50).

48 Deuxièmement, il appartenait à la chambre de recours de prendre également position, d’une part, sur la déclaration sous serment signée le 24 mai 2023 par le docteur K.J., responsable de la commercialisation et des ventes de la requérante, confirmant les activités de commercialisation et de promotion de celle-ci, notamment quant aux parts de marché en Autriche (annexe 32), et, d’autre part, sur la déclaration sous serment supplémentaire signée le 25 juillet 2023 par la même personne, confirmant les recettes obtenues et les unités de produits pharmaceutiques vendus sous la marque +PHARMA en Autriche entre janvier 2020 et mai 2023 (annexe 33).

49 Troisièmement, il appartenait à la chambre de recours d’effectuer une évaluation conjointe des éléments de preuve présentés par la requérante le 6 mars 2024, mentionnés au point 9 de la décision attaquée, incluant, notamment, une déclaration sous serment du docteur K. J. du 6 février 2024, expliquant l’usage des différents types d’emballages des produits pharmaceutiques commercialisés sous la marque antérieure et de leur évolution dans le temps (annexe 39), ainsi qu’une confirmation des parts du marché détenus par les produits vendus sous la marque antérieure, analyse effectuée par I. H., un institut de sondage, et datée du 23 février 2024 (annexe 41).

50 Or, si l’EUIPO effectue, pour la première fois devant le Tribunal, des analyses visant les éléments rappelés aux points 48 et 49 ci-dessus, de telles analyses, cependant, ne ressortent pas de la décision attaquée. En effet, la chambre de recours s’est fondée, ainsi qu’il ressort de ce qui précède, sur l’altération substantielle du caractère distinctif de la marque antérieure lors de son utilisation. Dans ces circonstances, elle a également considéré que les factures présentées par la requérante avaient une force probante limitée (voir point 28 ci-dessus). En revanche, elle n’a pas effectué d’évaluation des chiffres ressortant des différentes déclarations sur l’honneur, présentés par le docteur K. J., ou encore, des données présentées par l’institut de sondage I.H. mentionnés aux points 48 et 49 ci-dessus. De surcroît, force est de constater que, dans la décision attaquée, la chambre de recours n’a pas repris, sur ces points, la motivation de la division d’opposition.

51 Partant, la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en ne prenant pas en compte les éléments de preuve produits par la requérante et examinés aux points 38 à 46 ci-dessus, en raison de ce qu’ils comportaient des représentations altérant le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, et donc ne démontraient pas l’usage de cette marque.

52 Il s’ensuit que, dans la mesure où les éléments de preuve précités sont pertinents pour la question du caractère distinctif accru par l’usage, notamment auprès d’un public professionnel de médecins et d’autres praticiens dans le domaine de la santé, et étant donné que cette question est pertinente dans le cadre de l’appréciation globale de l’existence d’un risque de confusion, il convient d’accueillir le premier moyen de la requérante et d’annuler la décision attaquée.

53 En effet, comme il ressort du point 82 de la décision attaquée, la chambre de recours, après avoir refusé d’admettre l’existence d’un caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure, a considéré que celle-ci possédait un caractère distinctif intrinsèque faible, voire minime. Partant, il ne saurait être exclu que, au cas où la chambre de recours serait parvenue à une conclusion différente en ce qui concerne le caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure, des conséquences décisives auraient pu en être tirées quant à l’existence d’un risque de confusion.

54 En revanche, le Tribunal ne saurait procéder à la réformation de la décision attaquée sollicitée par la requérante, dès lors que la chambre de recours n’a pas pris position, dans celle-ci, sur tous les aspects liés à la question du caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure, au regard de l’ensemble des éléments de preuve pertinents présentés par la requérante. À cet égard, le pouvoir de réformation reconnu au Tribunal par l’article 72, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001, n’a pas pour effet de lui conférer la compétence de procéder à une appréciation sur laquelle la chambre de recours n’a pas encore pris position (voir, en ce sens, arrêt du 23 janvier 2025, EUIPO/Neoperl, C‑93/23 P, EU:C:2025:33, point 69).

55 Plus particulièrement, en l’espèce, il convient de relever que la chambre de recours s’est limitée, dans la décision attaquée, à effectuer des références résumées et ciblées à certains éléments de preuve, en raison de son approche erronée consistant à estimer que la quasi-totalité des éléments de preuve présentés devant elle modifiaient le caractère distinctif de la marque antérieure. Or, en procédant ainsi, la chambre de recours n’a pas évalué l’ensemble des éléments de preuve, portant également sur des éléments pertinents quant à la durée de l’utilisation de la marque antérieure, les volumes des ventes en cause ressortant des factures présentées par la requérante, les parts de marché dans le secteur concerné, ou encore les publicités visant le public pertinent. Ainsi, il appartiendra à la chambre de recours d’apprécier, pour la première fois, si les éléments de preuve, pris dans leur ensemble, démontrent l’existence d’un caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 33 à 36 ci-dessus.

56 Dans ces circonstances, tout en ayant fait droit au premier moyen de la requérante (voir point 52 ci-dessus), le Tribunal juge encore opportun de se prononcer, également, sur le second moyen de la requérante.

Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’ article 8 , paragraphe 5 , du règlement 2017/1001

57 Selon la requérante, une appréciation juridique correcte de la marque antérieure aurait démontré que celle-ci avait acquis une notoriété en Autriche pour des produits pharmaceutiques. Compte tenu d’un taux de parts de marché atteignant parfois 18,9 % pour des substances génériques très demandées, il s’agit même, selon elle, d’une marque très connue en Autriche. En substance, étant donné que les marques en cause sont similaires, il ne ferait aucun doute que la marque demandée sera associée à la marque antérieure et se place délibérément dans son sillage, sans qu’un juste motif n’ait été invoqué à cet égard. Par conséquent, les conditions prévues à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 seraient également remplies.

58 Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure enregistrée au sens du paragraphe 2, la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union ou une marque nationale qui jouit d’une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice.

59 En l’espèce, aux points 98 à 100 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté, en substance, que les éléments de preuve produits pour prouver le caractère distinctif accru par l’usage, étant les mêmes que ceux visant à démontrer la renommée, étaient également insuffisants dans ce dernier contexte. En effet, ils ne permettraient pas à la chambre de recours de tirer des conclusions claires quant à la reconnaissance sur le marché de la marque antérieure, consistant en un signe non stylisé +PHARMA. Il s’ensuit, selon la chambre de recours, que les conditions visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 ne sont pas remplies.

60 L’EUIPO conteste les allégations de la requérante. Selon lui, la chambre de recours a considéré à bon droit que la marque antérieure n’avait pas acquis de renommée, au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001. L’une des conditions énoncées dans cette disposition n’étant pas remplie, le deuxième moyen invoqué par la requérante devrait également être rejeté.

61 À cet égard, tout d’abord, il convient de rappeler que les éléments de preuve produits par la requérante pour prouver le caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure étaient les mêmes que ceux visant à démontrer la renommée de celle-ci. Ensuite, il y a lieu de constater que la chambre de recours a écarté les éléments de preuve relatifs à la renommée comme étant dépourvus de pertinence, sur la base d’une analyse analogue à celle effectuée pour écarter les éléments de preuve relatifs au caractère distinctif accru par l’usage. Or, le Tribunal a déjà conclu, dans le cadre de l’appréciation du premier moyen, que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en écartant, comme étant non pertinents, les éléments de preuve relatifs au caractère distinctif accru par l’usage (voir points 51 et 52 ci-dessus). Par conséquent, il convient également de conclure que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en écartant ces éléments comme non pertinents aux fins de démontrer la renommée de la marque antérieure. Cette erreur d’appréciation remet en cause la conclusion de la chambre de recours figurant aux points 98 et 99 de la décision attaquée, selon laquelle la requérante n’est pas parvenue à démontrer la renommée de la marque antérieure.

62 En outre, pour des raisons analogues à celles indiquées aux points 54 et 55 ci‑dessus, il n’entre pas non plus dans la compétence du Tribunal de procéder, dans les circonstances de l’espèce, à une réformation de la décision attaquée concernant la question de savoir si la marque antérieure devait être considérée comme étant renommée et, partant, de décider sur l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

63 Dès lors, il convient d’accueillir, également, le second moyen de la requérante.

64 Au vu de ce qui précède, il convient d’accueillir la demande en annulation de la décision attaquée.

Sur les dépens

65 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

66 L’EUIPO ayant succombé, il convient de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la requérante aux fins de la procédure devant le Tribunal, conformément aux conclusions de celle‑ci.

67 S’agissant des demandes de la requérante relatives aux dépens exposés au cours des procédures devant l’EUIPO, dans les circonstances d’espèce, il appartiendra à la chambre de recours de statuer, à la lumière du présent arrêt, sur le recours de la requérante contre la décision de la division d’opposition et sur les frais afférents à ces procédures devant l’EUIPO [voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2025, Starbuzz Tobacco/EUIPO – Mayflix (Discovery) , T‑404/24, non publié, EU:T:2025:826, point 54 et jurisprudence citée].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1) La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 7 novembre 2024 (affaire R 1217/2024-2) est annulée.

2) Le recours est rejeté pour le surplus.

3) L’EUIPO supportera ses propres dépens ainsi que ceux de +pharma arzneimittel GmbH.

Kowalik-Bańczyk

Buttigieg

Dimitrakopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 novembre 2025.

Signatures

* Langue de procédure : l’allemand

© European Union, https://eur-lex.europa.eu, 1998 - 2025

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