Arrêt du Tribunal (sixième chambre) du 25 juin 2025 (Extraits). K-Way SpA contre Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle.
• 62024TJ0372_EXT • ECLI:EU:T:2025:635
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ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)
25 juin 2025 ( * )
« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marque de l’Union européenne figurative représentant cinq bandes parallèles colorées – Usage sérieux de la marque – Nature de l’usage – Usage pour les produits pour lesquels la marque est enregistrée – Article 18, paragraphe 1, sous a), et article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 »
Dans l’affaire T‑372/24,
K-Way SpA, établie à Milan (Italie), représentée par M es D. Sindico et E. Ravezzani, avocats,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. R. Raponi, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été
Adorno Gubbini, demeurant à Bagnolo Mella (Italie),
LE TRIBUNAL (sixième chambre),
composé de M me M. J. Costeira, présidente, MM. U. Öberg et P. Zilgalvis (rapporteur), juges,
greffier : M me R. Ūkelytė, administratrice,
vu la phase écrite de la procédure,
à la suite de l’audience du 20 mars 2025,
rend le présent
Arrêt ( 1 )
1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, K-Way SpA, demande, à titre principal, la réformation et, à titre subsidiaire, l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 21 mai 2024 (affaire R 1748/2023‑2) (ci-après la « décision attaquée »).
[ omissis ]
En droit
[ omissis ]
Sur la demande en annulation
[ omissis ]
Sur la première branche, portant sur les appréciations des preuves de l’usage relatives aux magasins monomarques
29 La requérante conteste les conclusions de la chambre de recours, figurant au point 57 de la décision attaquée, selon lesquelles, si les preuves relatives aux enseignes et à l’aménagement de ses magasins démontrent que la marque contestée a fait l’objet d’un usage qui n’est pas purement symbolique, elles n’établissent pas automatiquement que chaque produit vendu dans ces magasins portait cette marque. Ces conclusions seraient contraires à la législation de l’Union et à la jurisprudence issue de l’arrêt du 11 septembre 2007, Céline (C‑17/06, EU:C:2007:497), selon laquelle il n’y aurait pas d’obligation d’apposer la marque en cause sur les produits eux-mêmes pour prouver son usage sérieux. L’usage d’une enseigne pourrait être considéré comme un usage pour des produits lorsque le tiers utilise ledit signe d’une telle façon qu’il s’établit un lien entre le signe constituant la dénomination sociale ou l’enseigne de ce tiers et les produits commercialisés par ledit tiers.
30 La requérante estime que le lien entre les magasins monomarques, dont l’enseigne porte la marque contestée, et les produits commercialisés dans ces derniers a été prouvé. Tous les magasins auraient le même aménagement, avec la marque contestée « bien en vue », et seraient conçus de manière à créer un lien direct entre cette marque et les produits commercialisés dans ces magasins. Selon la requérante, au vu de l’ensemble des éléments de preuve soumis, la chambre de recours aurait dû reconnaître le lien automatique entre l’enseigne et les produits commercialisés dans les magasins et conclure à l’existence d’un usage de la marque contestée pour chaque produit de ces magasins, indépendamment de la visibilité du signe sur les produits eux-mêmes.
31 Selon la requérante, c’est parce que la chambre de recours a omis d’établir un lien entre l’enseigne et les produits vendus dans les magasins que, à tort, elle n’a pas considéré que les photographies sur lesquelles apparaissaient des sacs à main, des porte-documents et des sacs pour faire les courses prouvaient l’usage de la marque contestée pour ces produits.
32 L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.
33 En l’espèce, au point 57 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que tous les magasins présentaient le même aménagement, avec la marque contestée « bien en vue ». Elle a considéré que l’usage de la marque contestée sur les enseignes des magasins monomarques servait à étayer les preuves de l’usage du signe en cause sur les produits concernés et démontrait que ce signe avait été utilisé d’une manière qui n’était pas purement symbolique. Toutefois, selon elle, l’usage de la marque contestée sur les enseignes des magasins monomarques ne signifiait pas automatiquement que chaque produit vendu dans ces magasins portait ladite marque.
34 À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence à laquelle se réfère la requérante, l’usage de la dénomination sociale, du nom commercial ou d’une enseigne peut être considéré comme un usage sérieux de la marque enregistrée lorsque le signe est apposé sur les produits commercialisés ou lorsque, même en l’absence d’apposition, ce signe est utilisé de telle façon qu’il s’établit un lien entre le signe constituant la dénomination sociale, le nom commercial ou l’enseigne et les produits commercialisés ou les services fournis [arrêt du 26 avril 2023, Rochem Group/EUIPO – Rochem Marine (R.T.S. ROCHEM Technical Services), T‑546/21, non publié, EU:T:2023:221, point 61 ; voir également, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2007, Céline, C‑17/06, EU:C:2007:497, points 22 et 23].
35 Il y a également lieu de relever que, au point 76 de l’arrêt du 8 juillet 2020, Euroapotheca/EUIPO – General Nutrition Investment (GNC LIVE WELL) (T‑686/19, non publié, EU:T:2020:320), il a été jugé qu’un lien entre un signe représenté sur une enseigne et les produits commercialisés sous cette enseigne était établi, étant donné que les photographies d’enseignes dans des points de vente servaient à désigner les ventes de ces produits. Dans cet arrêt, le Tribunal a notamment tenu compte de la circonstance selon laquelle le titulaire de la marque en question vendait ses propres produits et en faisait la publicité afin de créer et de conserver une part de marché pour les produits en cause.
36 Cependant, force est de constater que, en l’espèce, la chambre de recours n’a pas méconnu la jurisprudence citée au point 34 ci-dessus, à laquelle se réfère la requérante. En effet, ainsi qu’il ressort du point 57 de la décision attaquée, elle a considéré que l’usage de la marque contestée sur l’enseigne des magasins monomarques de la requérante était pertinent dans la mesure où il servait à étayer l’usage de ladite marque.
37 À cet égard, il doit également être relevé que, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 8 juillet 2020, GNC LIVE WELL (T‑686/19, non publié, EU:T:2020:320), les photographies de l’enseigne des magasins reproduisant la marque concernée n’étaient qu’un élément parmi d’autres permettant de conclure à l’usage sérieux de ladite marque. En revanche, contrairement à ce qu’avance la requérante en l’espèce, il ne saurait en être déduit que la circonstance selon laquelle des produits sont vendus dans des magasins portant une enseigne correspondant à une marque de l’Union européenne suffit, dans tous les cas, pour établir l’usage sérieux de cette marque pour l’ensemble de ces produits.
38 Par ailleurs, ainsi qu’il ressort du dossier (points 45 et 46 de la décision attaquée) et comme l’avance l’EUIPO, la requérante utilise plusieurs marques pour les produits qu’elle commercialise. Or, cette circonstance peut être de nature à empêcher que le consommateur perçoive un lien entre l’usage de la marque représentée sur l’enseigne des magasins et les produits, commercialisés dans ces magasins, sur lesquels la marque concernée n’a pas été apposée [voir, en ce sens, arrêt du 15 octobre 2020, Decathlon/EUIPO – Athlon Custom Sportswear (athlon custom sportswear), T‑349/19, non publié, EU:T:2020:488, point 73].
39 Cette appréciation ne saurait être remise en cause par la circonstance, invoquée par la requérante lors de l’audience en réponse à une question du Tribunal, selon laquelle elle utiliserait certaines de ses marques uniquement pour des produits précis et d’autres, comme la marque contestée, de manière générale, sur les emballages et dans la publicité, pour identifier l’ensemble de son activité.
40 À cet égard, il doit être rappelé que, conformément à la jurisprudence citée au point 24 ci-dessus, l’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné.
41 Il s’ensuit que la chambre de recours n’a commis ni d’erreur de droit ni d’erreur d’appréciation dans l’examen des éléments de preuve relatifs aux magasins monomarques de la requérante, de sorte que la présente branche du moyen unique doit être écartée.
[ omissis ]
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (sixième chambre)
déclare et arrête :
1) La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 21 mai 2024 (affaire R 1748/2023-2) est réformée en tant qu’elle concerne les sacs pour faire les courses, relevant de la classe 18, et le recours formé auprès de ladite chambre de recours de l’EUIPO par K-Way SpA contre la décision de la division d’annulation du 11 juillet 2023 est accueilli en ce qui concerne lesdits produits.
2) La décision de la division d’annulation du 11 juillet 2023 est annulée dans la mesure où elle a déclaré la déchéance de la marque de l’Union européenne enregistrée sous le numéro 3971561 pour non-usage en ce qui concerne les sacs pour faire les courses susmentionnés.
3) Le recours est rejeté pour le surplus.
4) Chaque partie supportera ses propres dépens.
Costeira
Öberg
Zilgalvis
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 25 juin 2025.
Signatures
* Langue de procédure : l’italien.
1 Ne sont reproduits que les points du présent arrêt dont le Tribunal estime la publication utile.