Order of the President of the Court of First Instance of 11 March 1994.
Susan Ryan-Sheridan v European Foundation for the Improvement of Living and Working Conditions.
T-589/93 R • 61993TO0589 • ECLI:EU:T:1994:26
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- 1 Cited paragraphs:
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- 4 Outbound citations:
ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL
11 mars 1994 ( *1 )
«Fonctionnaires — Procédure de référé - Mesures provisoires»
Dans l'affaire T-589/93 R,
Susan Ryan-Sheridan, membre du personnel de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail, demeurant à Dublin, représentée par M" Luc Misson et Marc-Albert Lucas, avocats au barreau de Liège, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de M e Evelyne Korn, 21, rue de Nassau,
partie requérante,
contre
Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail, ayant son siège à Dublin, représentée par M. John McColgan, chef de l'administration, en qualité d'agent, assisté de M e Denis Waelbroeck, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Georgios Kremlis, membre du service juridique de la Commission des Communautés européennes, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
ayant pour objet, d'une part, une demande de suspension de:
—
la procédure consécutive à l'avis de vacance d'un emploi d'administrateur de programme de publication (A 7/A 6), publié le 28 septembre 1993, et à l'avis de concours restreint («restricted competition») A 7/PMP, publié le même jour, concernant le pourvoi de cet emploi;
—
la décision du 22 novembre 1993, par laquelle le directeur de la Fondation a exclu la requérante de la procédure de pourvoi de l'emploi en question;
—
la décision du comité de recrutement, par laquelle celui-ci a estimé que la requérante n'était pas suffisamment qualifiée et expérimentée dans les différents domaines spécifiques relatifs à l'emploi vacant pour être invitée à un entretien;
et, d'autre part, une demande d'injonction à la partie défenderesse de suspendre provisoirement toutes les opérations ultérieures de la procédure de pourvoi en cours,
LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
rend la présente
Ordonnance
Faits et procédure
1Par requête enregistrée au greffe du Tribunal le 28 décembre 1993, la requérante a introduit, en vertu de l'article 44, paragraphes 1 et 4, du règlement (CECA, CEE, Euratom) n o 1860/76 du Conseil, du 29 juin 1976, portant fixation du régime applicable au personnel de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail (ci-après «Fondation») ( JO L 214, p. 24 ), un recours visant à l'annulation, en premier lieu, de l'avis de vacance d'un emploi d'administrateur de programme de publication (A 7/A 6) du 28 septembre 1993, en deuxième lieu, de l'avis de concours restreint A 7/PMP, du même jour, concernant le pourvoi de cet emploi, en troisième lieu, de la décision du 22 novembre 1993, par laquelle le directeur de la Fondation l'a exclue de la procédure de pourvoi de l'emploi en question, en quatrième lieu, de la décision du comité de recrutement par laquelle celui-ci a estimé qu'elle n'était pas suffisamment qualifiée et expérimentée dans les différents domaines spécifiques relatifs à l'emploi vacant pour être invitée à un entretien et, enfin, de toute opération ultérieure de la procédure de pourvoi en cours. La requérante demande, en outre, que la Fondation soit condamnée à lui verser, à titre de dommages et intérêts, une somme de 50000 BFR à titre provisionnel et sous réserve de parfaire en cours d'instance.
2Par acte séparé, enregistré au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a également introduit, en vertu de l'article 44, paragraphe 4, du règlement précité, une demande de sursis à l'exécution des actes attaqués, ainsi qu'une demande d'injonction à la Fondation d'avoir à suspendre provisoirement toutes les opérations ultérieures de la procédure de pourvoi en cours.
3La partie défenderesse a présenté ses observations écrites sur la présente demande en référé le 28 janvier 1994.
4Par télécopie enregistrée au greffe du Tribunal le 11 février 1994, la requérante a versé deux documents additionnels au dossier, sur lesquels la partie défenderesse a présenté ses observations écrites le 22 février 1994.
5Par lettre du 18 février 1994, la partie requérante a demandé au président du Tribunal de lui accorder la faculté de répliquer oralement aux arguments présentés par la défenderesse dans ses observations écrites.
6Les parties ont été entendues en leurs explications orales lors de l'audition du 4 mars 1994.
7Avant d'examiner le bien-fondé de la présente demande en référé, il convient de rappeler brièvement les antécédents du litige, tels qu'ils ressortent des mémoires déposés par les parties.
8La requérante est membre du personnel de la Fondation depuis le 26 mars 1979 et occupe, à l'heure actuelle, un emploi de responsable des publications («Publications Officer»), relevant de la catégorie B et classé au grade 2.
9L'emploi d'administrateur de programme de publication, pour le pourvoi duquel la procédure litigieuse a été ouverte, relève de la catégorie A.
10A la suite de la publication de l'avis de vacance et de l'avis de concours restreint concernant l'emploi en question, trois candidatures internes ont été déposées, dont celle de la requérante.
11Par lettre du 22 novembre 1993, le directeur de la Fondation a fait savoir à la requérante que sa candidature à cet emploi ne serait pas retenue («your candidature for this post will not be considered further»), au motif que le comité de recrutement l'avait considérée comme n'étant pas suffisamment qualifiée et expérimentée dans les différents domaines spécifiques relatifs à l'emploi vacant pour être invitée à un entretien («they do not consider that you were sufficiently qualified and experienced in the various specialised areas of the advertised post to warrant calling for interview»).
En droit
12En vertu des dispositions combinées des articles 185 et 186 du traité CE et de l'article 4 de la décision 88/591/CECA, CEE, Euratom du Conseil, du 24 octobre 1988, instituant un Tribunal de première instance des Communautés européennes ( JO L 319, p. 1 ), telle que modifiée par la décision 93/350/Euratom, CECA, CEE du Conseil, du 8 juin 1993 ( JO L 144, p. 21 ), le Tribunal peut, s'il estime que les circonstances l'exigent, ordonner le sursis à l'exécution de l'acte attaqué ou prescrire les mesures provisoires nécessaires.
13L'article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal prévoit que les demandes relatives à des mesures provisoires visées aux articles 185 et 186 du traité doivent spécifier les circonstances établissant l'urgence, ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l'octroi de la mesure à laquelle elles concluent. Les mesures demandées doivent présenter un caractère provisoire, en ce sens qu'elles ne doivent pas préjuger la décision sur le fond (voir l'ordonnance du président du Tribunal du 7 janvier 1994, Hecq/Commission, T-564/93 R, RecFP p. II-1, point 17 , et, en dernier lieu, l'ordonnance du président du Tribunal du 8 février 1994, Avramidou/Parlement, T-6/94 R, non publiée au Recueil, point 8 ).
Arguments des parties
14S'agissant du fumus boni juris, la requérante fait valoir que les opérations de la procédure de concours en question, ainsi que les décisions de ne pas prendre en compte sa candidature sont entachées de plusieurs illégalités. En premier lieu, l'avis de vacance interne n'indiquerait aucune condition précise d'aptitude à l'emploi à pourvoir. En deuxième lieu, l'avis de vacance interne et l'avis de concours restreint révéleraient des différences substantielles. En troisième lieu, le comité de recrutement ne saurait en aucun cas être considéré comme présentant à l'égard de la requérante les garanties formelles d'impartialité requise, du fait que l'un de ses membres entretiendrait des relations extrêmement conflictuelles avec elle, ayant même, selon celle-ci, opéré un détournement de pouvoir dans la procédure de notation de la requérante. Toujours selon la requérante, le comité de recrutement a, enfin, commis une erreur manifeste d'appréciation, dans la mesure où elle présenterait a priori les qualifications requises pour participer au concours destiné à pourvoir l'emploi déclaré vacant du fait de la similitude entre les fonctions y afférentes et les fonctions qu'elle exerce actuellement.
15S'agissant de l'urgence, la requérante allègue, en substance, que, si, à la fin de la procédure de concours litigieuse, une autre personne est nommée dans l'emploi à pourvoir, elle se verra, en raison de la correspondance entre ses fonctions actuelles et celles correspondant à cet emploi, privée de toute fonction au sein de l'institution, ce préjudice étant, selon elle, grave et difficilement réparable, tant du point de vue matériel que du point de vue moral. Ce préjudice moral serait, selon la requérante, aggravé par le sentiment qu'elle éprouverait d'avoir été la victime d'un conflit avec son supérieur hiérarchique.
16La partie défenderesse, pour sa part, fait valoir qu'un examen, même succinct, des différents moyens soulevés par la requérante à l'appui de son recours ne peut que conduire à la conclusion que celui-ci est manifestement non fondé. Tout d'abord, l'avis de vacance interne préciserait clairement que le critère décisif pour l'attribution de l'emploi en cause à un candidat interne est l'aptitude à assumer les diverses responsabilités décrites dans l'avis de vacance. Quant à l'avis de concours restreint, il ne contiendrait, en fait, qu'un résumé des exigences formulées par la Fondation, chaque intéressé devant, selon le même avis, s'adresser au préalable au secrétariat du comité de recrutement. Quant au prétendu défaut d'impartialité du comité de recrutement, du fait qu'y siégerait un supérieur hiérarchique de la requérante, la défenderesse estime que, s'agissant du chef du service concerné, sa participation au comité de recrutement serait normale et même imperative.
17La partie défenderesse estime, par ailleurs, qu'aucune circonstance établissant l'urgence n'existe en l'espèce. Si le recours devait aboutir à un résultat favorable à la requérante, celle-ci serait pleinement rétablie dans ses droits. En tout état de cause, les fonctions actuellement occupées par la requérante étant, selon la défenderesse, totalement distinctes des fonctions afférentes à l'emploi à pourvoir, l'attribution de cet emploi à un autre candidat ne pourrait entraîner pour la requérante aucun préjudice autre que celui qui résulterait de la décision de ne pas lui attribuer cet emploi.
Appréciation du juge des référés
18II convient de constater, à titre liminaire, que les mesures provisoires sollicitées par la requérante visent en substance à obtenir la suspension d'une procédure, en cours, de pourvoi d'un emploi vacant.
19Il y a lieu de rappeler, ensuite, que, selon une jurisprudence constante, le juge des référés doit apprécier l'urgence de l'adoption des mesures provisoires en examinant si l'exécution des actes litigieux, avant que n'intervienne une décision sur le fond, est de nature à entraîner, pour la partie qui a sollicité ces mesures, des dommages irréversibles, qui ne pourraient être réparés, même si la décision attaquée était annulée, ou qui, malgré leur caractère provisoire, seraient hors de proportion avec l'intérêt de la partie défenderesse à ce que ses actes soient exécutés, même lorsqu'ils font l'objet d'un recours contentieux (voir l'ordonnance du président de la troisième chambre de la Cour du 11 juillet 1988, Hanning/Parlement, 176/88 R, Rec. p. 3915, point 9 ).
20En l'espèce, il faut observer que, si, par hypothèse, le Tribunal devait reconnaître le bien-fondé du recours au principal, il incomberait à la partie défenderesse d'arrêter les mesures nécessaires au rétablissement des droits de la requérante, y compris, le cas échéant, le retrait de l'éventuelle nomination d'un autre candidat qui serait intervenue entre-temps, et, par voie de conséquence, l'ouverture d'une nouvelle procédure de pourvoi de l'emploi litigieux ou, à tout le moins et en tout état de cause, les mesures nécessaires pour protéger ses intérêts de manière appropriée. Dans ces conditions, aucun préjudice irréparable ne pourrait résulter de l'absence de suspension de l'exécution des actes litigieux.
21Par ailleurs, d'une part, l'allégation de la requérante selon laquelle, «si une nomination devait intervenir, le préjudice se concrétiserait de manière dramatique puisque la requérante se verrait, en raison de la correspondance entre ses fonctions actuelles et celles qui sont à pourvoir, privée purement et simplement de toute fonction au sein de l'institution» n'est pas étayée, à première vue, par des éléments de preuve de nature à emporter la conviction du juge des référés. En effet, même les considérations avancées sur ce point par la requérante, au cours de l'audition du 4 mars 1994, n'ont pas été de nature, à ce stade de la procédure et dans le cadre de l'examen de l'existence d'un préjudice grave et irréparable, à entamer la crédibilité des arguments de la partie défenderesse, selon laquelle les fonctions actuelles de la requérante sont distinctes des fonctions afférentes à l'emploi à pourvoir, en particulier dans la mesure où ces dernières impliquent «la formulation et le développement d'une politique et d'une stratégie pour un programme de publications» («the formulation and development of policy and strategy for a publications' programme»). Dans ces conditions, seul l'examen du recours au fond, dans la mesure où il impliquerait une comparaison entre les fonctions afférentes aux deux emplois, permettra, le cas échéant, de tenir compte de cet argument, sans que le juge des référés puisse préjuger de l'appréciation du juge du fond sur cette argumentation de la requérante.
22D'autre part, la requérante n'est nullement fondée à invoquer, pour alléguer l'existence d'un préjudice grave et irréparable, «une concurrence effective ou potentielle de plus en plus grande», qui réduirait d'autant ses chances d'engagement à l'emploi vacant, puisqu'une telle situation constitue la finalité normale de toute procédure de concours.
23Enfin, la requérante ne peut pas davantage se prévaloir utilement, pour établir l'existence d'un préjudice grave et irréparable, d'un prétendu préjudice moral qui résulterait, en cas de nomination d'un autre candidat, du «sentiment d'avoir été l'objet de ces mesures en raison d'un conflit personnel avec son supérieur hiérarchique». En effet, outre que la circonstance invoquée est de nature purement subjective, il n'apparaît pas qu'elle puisse impliquer pour la requérante un préjudice qui ne pourrait être réparé, le cas échéant, par la décision mettant fin à l'instance dans le recours principal.
24Il résulte de ce qui précède que la requérante n'a pas démontré que, en l'absence des mesures provisoires demandées, les actes litigieux pourraient lui causer un préjudice auquel il ne pourrait plus être remédié par l'exécution d'un arrêt du Tribunal et que, en tout état de cause, les préjudices éventuellement subis par elle seraient manifestement hors de proportion avec l'intérêt de la défenderesse à mettre fin à la procédure de pourvoi de l'emploi dont il s'agit.
25Dès lors, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner si les moyens et arguments invoqués par la requérante à l'appui du recours au principal revêtent une apparence de bon droit, les conditions permettant, en droit, l'octroi des mesures provisoires sollicitées ne sont pas remplies et, par conséquent, la demande doit être rejetée.
Par ces motifs,
LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL
ordonne:
1)
La demande en référé est rejetée.
2)
Les dépens sont réservés.
Fait à Luxembourg, le 11 mars 1994.
Le greffier
H. Jung
Le président
J. L. Cruz Vilaça
( *1 ) Langue de procédure: le français.
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