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Order of the Court (Seventh Chamber) of 29 September 2022.

CX v European Commission.

C-71/22 P • 62022CO0071 • ECLI:EU:C:2022:745

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Order of the Court (Seventh Chamber) of 29 September 2022.

CX v European Commission.

C-71/22 P • 62022CO0071 • ECLI:EU:C:2022:745

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ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)

29 septembre 2022 ( * )

« Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Fonction publique – Fonctionnaire – Enquête de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) – Négociation non autorisée et clandestine d’un marché – Conflit d’intérêts – Sanction disciplinaire – Révocation – Droit d’être entendu – Absences répétées du requérant et de son avocat à l’audition disciplinaire – Dénaturation des éléments de preuve – Devoir de sollicitude de la Commission européenne – Obligation de motivation – Principe ne bis in idem – Délai raisonnable – Pourvoi en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé »

Dans l’affaire C‑71/22 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 3 février 2022,

CX, représenté par M e É. Boigelot, avocat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. J. Passer, président de chambre, MM. F. Biltgen (rapporteur) et N. Wahl, juges,

avocat général : M. J. Richard de la Tour,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1 Par son pourvoi, CX demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 24 novembre 2021, CX/Commission, (T‑743/16 RENV II, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:824), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision de la Commission européenne, du 16 octobre 2013, lui infligeant la sanction de révocation sans réduction de ses droits à pension (ci-après la « décision litigieuse ») et, d’autre part, à la réparation des préjudices que celui-ci aurait subis en raison de cette décision.

2 Il ressort du point 58 de l’arrêt attaqué que cette sanction a été infligée au requérant en raison de la commission, entre les années 2001 et 2004, de deux fautes lourdes, consistant en des manquements d’une « particulière gravité », à savoir, d’une part, « la négociation non autorisée et clandestine » d’un marché relatif à la réalisation de sondages et, d’autre part, « la création et l’aggravation d’une situation de conflit d’intérêts ».

Sur le pourvoi

3 En vertu de l’article 181 du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter ce pourvoi, totalement ou partiellement, par voie d’ordonnance motivée.

4 Il y a lieu de faire application de cette disposition dans la présente affaire.

5 M. l’avocat général a, le 13 juin 2022, pris la position suivante :

« 1. [...]

2. [...] Par le présent pourvoi, le requérant demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué et de condamner la Commission européenne aux dépens du pourvoi ainsi que des procédures devant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne et le [Tribunal].

3. À l’appui de son pourvoi, le requérant soulève cinq moyens. Le premier, divisé en quatre branches, est tiré notamment de la méconnaissance des articles 4 et 22 de l’annexe IX du statut des fonctionnaires de l’Union européenne et du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne, dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le “statutˮ), qui mettent en œuvre le droit d’être entendu. Le deuxième moyen est tiré d’une dénaturation d’un élément de preuve, à savoir le courrier électronique du 6 septembre 2001, qui aurait, de manière erronée, prouvé l’existence d’une négociation non autorisée et clandestine d’un marché. Le troisième moyen est tiré du non-respect de l’obligation de motivation par le Tribunal en ce qui concerne sa réponse au moyen pris de la violation du devoir de sollicitude de la Commission. Le quatrième moyen est tiré de la méconnaissance de l’obligation de motivation concernant le grief tiré de la violation du principe ne bis in idem. Le cinquième moyen est tiré de la dénaturation de l’argumentation du requérant quant au dépassement du délai raisonnable.

Sur le premier moyen

Sur la première branche

4. La première branche du premier moyen est dirigée contre les points 215 à 235 de l’arrêt attaqué. Le requérant fait, en substance, valoir que le Tribunal a jugé, de manière erronée, que les indices apportés par la Commission suffisaient à renverser la présomption d’incapacité du requérant à comparaître devant l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’“AIPNˮ) tripartite découlant du certificat médical du 10 juin 2013, au motif qu’il a apprécié cette incapacité à comparaître à l’aune de critères juridiques erronés et que sa décision, à l’issue de cet appréciation, est entachée d’une dénaturation des éléments de preuve, d’erreurs manifestes d’appréciation, ainsi que d’erreurs et d’absences de motivation.

5. Plus précisément, le requérant fait valoir, en premier lieu, que, s’agissant de la réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, introduite le 8 octobre 2012, le Tribunal n’a pas établi à suffisance de droit que le requérant en serait lui-même l’auteur, et non son avocat ou une tierce personne. Il en serait de même en ce qui concerne les observations écrites soumises par le requérant le 16 mai 2013 au conseil de discipline, considérées, par le Tribunal, étant de nature à renverser la présomption d’incapacité du requérant découlant du certificat du 10 juin 2013.

6. En deuxième lieu, le requérant conteste le motif figurant au point 218 de l’arrêt attaqué, selon lequel l’avis médical du docteur A, du 5 avril 2013, à savoir trois mois avant la date proposée pour la première audition devant l’AIPN tripartite, constituait un indice sérieux contredisant le certificat médical du 10 juin 2013.

7. En troisième lieu, le requérant affirme que son état de santé lors de sa participation active devant le conseil de discipline le 21 mai 2013 ne saurait préjuger de celui constaté des semaines plus tard, dans une situation d’aggravation quotidienne de son état de santé.

8. En quatrième lieu, le requérant conteste, d’abord, la teneur du rapport d’expertise du docteur S, du 26 juin 2013, dans la mesure où la Commission n’a ni versé au dossier un document permettant d’établir la portée de la mission confiée à ce médecin ni démontré qu’elle avait spécifiquement interrogé ce dernier sur la capacité du requérant à comparaître devant l’AIPN tripartite. Ensuite, le requérant conteste, d’une part, l’existence de l’entretien téléphonique entre le docteur A et le docteur S, sur la base duquel le docteur A avait estimé que le requérant était apte à participer à l’audition disciplinaire du 1 er juillet 2013 et, d’autre part, que le docteur A l’aurait contacté par téléphone pour l’inviter à prendre connaissance en personne du résultat de l’examen réalisé par le docteur S.

9. Enfin, le requérant soutient que tout au long de ses développements, le Tribunal s’attache à contredire l’affirmation, contenue dans le certificat médical du 10 juin 2013, selon laquelle le requérant n’aurait pas été “en mesure d’assurer son droit à se défendre, et ce au moins depuis septembre 2012ˮ, alors que la question centrale est de savoir s’il était en mesure d’assurer son droit de se défendre spécifiquement aux dates fixées pour la réunion de l’AIPN tripartite, à savoir les 1 er et 19 juillet 2013, ce dont le certificat médical du 10 juin 2013 atteste du contraire, de manière spécifique et incontestable.

10. À titre liminaire, il convient de relever que, par la première branche du premier moyen, le requérant fait valoir que le Tribunal a méconnu les critères applicables pour apprécier l’état d’incapacité d’un fonctionnaire à comparaître devant le conseil de discipline ainsi que l’obligation de motivation et les règles de la charge de la preuve.

11. D’emblée, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence de la Cour, en vertu de l’article 256 TFUE ainsi que de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’appréciation des éléments de preuve soumis au Tribunal ne constitue pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir, en ce sens, arrêts du 2 mars 1994, Hilti/Commission, C‑53/92 P, EU:C:1994:77, point 42, et du 28 février 2018, mobile.de/EUIPO, C‑418/16 P, EU:C:2018:128, point 65).

12. Le pouvoir de contrôle de la Cour sur les constatations de fait opérées par le Tribunal s’étend donc, notamment, à l’inexactitude matérielle de ces constatations résultant des pièces du dossier, à la dénaturation des éléments de preuve, à la qualification juridique de ceux‑ci et à la question de savoir si les règles en matière de charge et d’administration de la preuve ont été respectées (voir, en ce sens, arrêts du 25 janvier 2007, Sumitomo Metal Industries et Nippon Steel/Commission, C‑403/04 P et C‑405/04 P, EU:C:2007:52, point 39, ainsi que du 29 novembre 2018, Bank Tejarat/Conseil, C‑248/17 P, EU:C:2018:967, point 37).

13. La dénaturation doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêts du 5 septembre 2019, Union européenne/Guardian Europe et Guardian Europe/Union européenne, C‑447/17 P et C‑479/17 P, EU:C:2019:672, point 137 ; du 19 septembre 2019, Pologne/Commission, C‑358/18 P, non publié, EU:C:2019:763, point 45, ainsi que du 28 avril 2022, Yieh United Steel/Commission, C‑79/20 P, EU:C:2022:305, point 53).

14. En l’espèce, le Tribunal a jugé que les indices apportés par la Commission permettaient de renverser la présomption d’incapacité du requérant à comparaître devant l’AIPN tripartite découlant du certificat médical du 10 juin 2013. Dans ce contexte, si le requérant ne saurait demander à la Cour d’apprécier les éléments de preuve soumis au Tribunal, il est toutefois recevable à soulever devant la Cour une argumentation sur la question de savoir si le Tribunal a correctement appliqué des critères juridiques (arrêt du 16 juin 2016, Evonik Degussa et AlzChem/Commission, C‑155/14 P, EU:C:2016:446, point 26). La première branche est ainsi recevable.

15. À cet égard, il convient de relever que le Tribunal a jugé, au point 236 de l’arrêt attaqué, que si le requérant n’était pas en capacité de comparaître en personne devant l’AIPN tripartite, il pouvait néanmoins soit se faire représenter par l’avocat de son choix, soit soumettre des observations écrites. Or, à l’appui de la première branche de son premier moyen, le requérant se borne à contester l’analyse du Tribunal concernant les indices apportés par la Commission en vue de renverser la présomption d’incapacité du requérant, mais n’explique pas pourquoi il ne s’est pas prévalu de la possibilité de présenter des observations écrites, conformément à l’article 4 de l’annexe IX du statut.

16. En outre, s’il est vrai que, ainsi qu’il ressort du point 45 de l’arrêt attaqué, dans le certificat médical du 10 juin 2013, le médecin traitant du requérant a indiqué que ce dernier n’était pas en mesure de se défendre, et ce au moins depuis le mois de septembre 2012, le Tribunal a toutefois mis en exergue des éléments permettant de démontrer que cela n’était pas le cas en l’espèce. À cet égard, il convient d’emblée de préciser que rien n’empêchait le Tribunal de procéder ainsi, dès lors qu’il ressort de la jurisprudence que les certificats médicaux jouissent d’une présomption de régularité à caractère réfragable (voir, en ce sens, arrêts du 27 avril 1989, Fedeli/Parlement 271/87, EU:C:1989:175, ainsi que du 19 juin 1992, V./Parlement, C‑18/91 P, EU:C:1992:269, points 32 et 33).

17. Ainsi, le Tribunal a souligné plusieurs éléments.

18. En premier lieu, celui-ci a constaté que, depuis le mois de septembre 2012, le requérant a saisi l’administration d’une réclamation administrative préalable le 8 octobre 2012, puis présenté des observations écrites, le 16 mai 2013, au conseil de discipline. Dans ce contexte, l’argumentation du requérant selon laquelle le Tribunal n’a pas établi que le requérant en serait personnellement l’auteur ne saurait prospérer, dans la mesure où le requérant aurait pu soumettre des observations écrites rédigées par le même auteur de ces actes, au lieu de ne pas se présenter aux deux auditions disciplinaires auxquelles il avait été convoqué. En outre, dans ses écrits devant le Tribunal et le Tribunal de la fonction publique, le requérant n’a jamais précisé que la réclamation ainsi que les observations avaient été rédigées par un tiers.

19. En deuxième lieu, si c’est à bon droit que le requérant fait valoir que l’avis médical du docteur A, du 5 avril 2013, selon lequel le requérant était en mesure de comparaître devant le conseil de discipline, ne saurait préjuger de l’état de santé du requérant aux dates des 1 er et 19 juillet 2013, cet avis, établi antérieurement au certificat médical du 10 juin 2013, constitue un autre élément susceptible de mettre en doute le contenu de ce certificat selon lequel le requérant se trouvait dans l’impossibilité de se défendre depuis le mois de septembre 2012.

20. En troisième lieu, le Tribunal a constaté, au point 223 de l’arrêt attaqué, que le requérant avait participé en personne, de manière active, au conseil de discipline du 21 mai 2013, et que cela permettait de démontrer qu’il était en mesure de se défendre, contrairement à ce qu’indiquait le certificat médical du 10 juin 2013.

21. En quatrième lieu, s’agissant de l’entretien téléphonique entre les docteurs A et S, à la suite de l’établissement par ce dernier du rapport médical du 27 juin 2013, qui ne comportait pas de conclusion quant à la capacité du requérant de comparaître, le requérant ne saurait valablement soutenir que le Tribunal aurait dû vérifier l’existence de cet entretien ou de l’entretien téléphonique entre le docteur A et le requérant. En effet, s’agissant de l’entretien entre le requérant et le docteur A, il ne résulte pas de ses écrits devant le juge de l’Union ou de la requête en pourvoi que le requérant nie l’existence de cet entretien. C’est en effet le contenu de l’entretien qui est contesté par le requérant.

22. À cet égard, contrairement à ce que prétend le requérant au point 32 de sa requête en pourvoi, à défaut d’éléments de preuve ou d’argumentation fournis par de ce dernier quant aux affirmations du docteur A, c’est à bon droit que le Tribunal a pu se fonder sur la version des faits présentée par la Commission, d’autant plus que, ainsi qu’il ressort du point 229 de l’arrêt attaqué, elle était étayée par le courriel envoyé par l’Office d’investigation et de discipline de la Commission européenne (IDOC) au requérant le 18 juillet 2013. Or, selon le principe de la libre appréciation des preuves, le seul critère pour apprécier la valeur de ce courriel résidait dans sa crédibilité (voir, en ce sens, arrêt du 26 septembre 2018, Infineon Technologies/Commission, C‑99/17 P, EU:C:2018:773, point 65 et jurisprudence citée).

23. Les mêmes observations valent également pour l’entretien téléphonique entre le docteur S et le docteur A, la version des faits étant étayée par le courriel du docteur A du 28 juin 2013. À cela, il convient d’ajouter le fait que le requérant aurait eu en plus la possibilité d’obtenir, en demandant à l’un ou à l’autre des médecins de confirmer, par écrit, le contenu de leur entretien téléphonique. Ledit requérant n’ayant pas procédé de la sorte, c’est à bon droit que le Tribunal a jugé que l’avis du docteur A, fondé en particulier sur la discussion qu’il avait eue avec le docteur S, n’a jamais été contredit par un autre médecin.

24. Par ailleurs, le requérant n’a pas expliqué pourquoi il n’a pas nommé un médecin de son choix afin de prendre connaissance du rapport médical du docteur S et de contester les conclusions du docteur A, ainsi que l’indique le courrier électronique que l’IDOC lui avait envoyé le 18 juillet 2013.

25. À la lumière de ce qui précède, la première branche du premier moyen doit être rejetée comme étant manifestement non fondée.

Sur la deuxième branche

26. Par la deuxième branche du premier moyen, le requérant fait valoir que le certificat médical du 10 juin 2013 n’a pas fait l’objet d’un examen complet par le Tribunal, dans la mesure où la Commission n’a jamais répondu à la question de savoir à quel médecin il pouvait et devait faire parvenir la version de celui-ci non expurgée des éléments relevant du secret médical.

27. De la même façon, le docteur S n’aurait pas pu procéder à une véritable contre-expertise, puisque la Commission n’aurait pas voulu connaître, puis lui transmettre, la version complète de ce certificat médical.

28. Le requérant soutient également que le Tribunal lui-même n’aurait pas demandé la production de l’intégralité du certificat médical, se contentant d’une version de celui-ci contenant des mentions médicales rayées par le requérant. Dans ces conditions, le Tribunal n’aurait pas pu examiner la motivation médicale avancée par le médecin traitant, ce qui entacherait le contrôle juridictionnel d’incomplétude sur un élément central du dossier et sur lequel reposerait l’appréciation de la responsabilité du défaut d’audition du requérant par l’AIPN tripartite.

29. À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande. La Cour a également souligné que la seule énonciation abstraite des moyens dans le pourvoi ne répond pas aux exigences posées à l’article 58 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour. En outre, il est précisé, à l’article 169, paragraphe 2, dudit règlement, que les moyens et les arguments de droit invoqués doivent identifier avec précision les points de motifs de la décision du Tribunal qui sont contestés. En effet, un pourvoi dépourvu de telles caractéristiques n’est pas susceptible de faire l’objet d’une appréciation juridique permettant à la Cour d’exercer la mission qui lui incombe et d’effectuer son contrôle de légalité (arrêt du 7 novembre 2013, Wam Industriale/Commission, C‑560/12 P, non publié, EU:C:2013:726, points 42 à 44).

30. En outre, selon la jurisprudence déjà exposée ci-dessus, il résulte de l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est, dès lors, seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que les éléments de preuve qui lui sont soumis. L’appréciation de ces faits et éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi. L’article 256 TFUE, l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour imposent au requérant d’indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par le Tribunal et de démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit celui‑ci à cette dénaturation (voir, en ce sens, ordonnance de la Cour du 7 mai 2015, Adler Modemärkte/OHMI, C‑343/14 P, non publiée, EU:C:2015:310, point 43 et jurisprudence citée).

31. En l’occurrence, le requérant n’indique pas, dans son pourvoi, quels sont les points de l’arrêt attaqué visés par ce grief. Dès lors, cette branche doit être rejetée comme étant manifestement irrecevable.

Sur la troisième branche

32. Par la troisième branche du premier moyen, le requérant avance que le Tribunal a jugé à tort que l’avocat du requérant n’a pas apporté de preuves concernant la réalité de ses voyages à l’étranger qui l’auraient empêché d’assister le requérant aux auditions disciplinaires auxquelles il avait été convoqué. En effet, le Tribunal n’a fourni aucune base légale qui permettrait d’exiger d’un avocat qu’il justifie de ses activités ou de ses absences auprès de la Commission. D’ailleurs, la Commission n’a jamais sollicité de telles preuves ni remis en cause le bien-fondé de son absence aux dates prévues.

33. S’agissant, plus précisément, de la seconde audition, la Commission aurait fixé celle-ci pendant les vacances judiciaires, ce que l’avocat du requérant aurait dénoncé dans sa lettre du 17 juillet 2013. Dans ces conditions, ce serait la Commission qui, ne pouvant ignorer les dates des vacances judiciaires, aurait volontairement placé le requérant dans une situation de vulnérabilité procédurale.

34. En outre, contrairement à ce qui aurait été jugé par le Tribunal, il n’aurait pas été possible pour le requérant de se faire représenter par un autre avocat de son choix devant l’AIPN tripartite, dans la mesure où il lui aurait été impossible de trouver un avocat qui reprenne en quelques jours un dossier aussi complexe, surtout pendant les vacances judiciaires.

35. Pour finir, le Tribunal n’aurait pas analysé la corrélation entre le dépassement du délai de deux mois, prévu à l’article 22, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut, imputable exclusivement à la Commission, ainsi qu’il ressort du point 346 de l’arrêt attaqué, et la précipitation de cette institution à fixer une seconde date d’audition pendant les vacances judiciaires. D’un côté, la Commission aurait maintenu une date dont elle ne pouvait ignorer qu’elle pénaliserait le requérant et violerait son droit de se défendre et, de l’autre côté, elle aurait dépassé de plus de deux mois le délai établi pour prendre la décision litigieuse, sans pour autant que le Tribunal ait décidé de sanctionner ce “deux poids, deux mesures”.

36. À titre liminaire, il y a lieu de rappeler, comme l’a jugé à bon droit le Tribunal, que le fait de ne pas entendre l’intéressé, conformément à l’article 7, troisième alinéa, de l’annexe IX du statut, n’entraîne pas l’annulation de la décision lui imposant une sanction disciplinaire si ce manquement est imputable à l’intéressé lui-même (arrêt du 7 mai 1969, X./Commission de contrôle, 12/68, EU:C:1970:44, point 17).

37. En outre, d’une part, l’AIPN n’est pas tenue de repousser indéfiniment la date de la dernière audition jusqu’à ce que l’intéressé soit en mesure d’y participer. Au contraire, tant dans l’intérêt du fonctionnaire que de l’administration, la décision mettant fin à la procédure disciplinaire ne peut être retardée sans justification. Tel est l’objet du délai d’un mois prévu à l’article 7, troisième alinéa, de l’annexe IX du statut, qui constitue une “règle de bonne administrationˮ (voir, en ce sens, arrêts du 4 février 1970, van Eick/Commission, 13/69, EU:C:1970:5, point 4 ; du 27 novembre 2001, Z/Parlement, C‑270/99 P, EU:C:2001:639, point 21, ainsi que du 18 décembre 1997, Daffix/Commission, T‑12/94, EU:T:1997:208, points 130 et 131).

38. En l’espèce, le Tribunal n’a pas exigé, contrairement à ce que soutient le requérant, qu’un avocat justifie de ses activités ou de ses absences auprès de la Commission. En effet, dans la mesure où l’AIPN n’est pas tenue de repousser indéfiniment la date d’une audition jusqu’à ce que l’intéressé soit en mesure d’y participer, il est nécessaire qu’un empêchement à assister aux auditions disciplinaires fixées par l’AIPN soit dûment justifié. Or, aucune preuve n’ayant été apportée quant à la réelle indisponibilité de l’avocat du requérant, l’absence d’audition du requérant peut être considérée comme exclusivement imputable à ce dernier.

39. D’autre part, l’argumentation du requérant selon laquelle le Tribunal n’aurait pas analysé la corrélation entre le dépassement du délai prévu à l’article 22, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut et le fait que la Commission se serait prétendument précipitée pour fixer la seconde date proposée pour l’audition pendant les vacances judiciaires ne saurait prospérer. En effet, s’il est exact que, au point 346 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que le fait d’avoir dû convoquer le requérant aux deux auditions disciplinaires ne saurait expliquer la raison pour laquelle la Commission a adopté la décision litigieuse le 16 octobre 2013, il n’en demeure pas moins que, au point 347 de cet arrêt, le Tribunal a constaté que, en tout état de cause, le requérant n’avait invoqué aucun argument juridique ou factuel susceptible d’établir que le dépassement du délai d’adoption de la décision litigieuse de plus de deux mois l’aurait empêché de se défendre efficacement ou aurait créé, à son égard, l’attente légitime qu’une sanction disciplinaire ne lui serait pas infligée. En outre, au point 350 dudit arrêt, le Tribunal a considéré que, aux points 208 à 215 de sa requête devant le Tribunal de la fonction publique, le requérant n’avait avancé aucun argument visant à démontrer que, en l’absence de cette irrégularité liée au dépassement de ce délai, la procédure aurait pu aboutir à un résultat différent.

40. En tout état de cause, à supposer que le requérant n’ait pas pu se faire représenter du fait de la difficulté de trouver un avocat qui reprenne en quelques jours un dossier aussi complexe, le requérant ne conteste pas qu’il avait la possibilité de soumettre des observations écrites, telles que prévues à l’article 4 de l’annexe IX du statut. En effet, le 6 juin 2013, l’AIPN a communiqué au requérant la date de la première audition, à savoir le 1 er juillet 2013, et, le 2 juillet 2013, l’a informé de la date de la seconde audition, à savoir le 19 juillet 2013. Or, le Tribunal a relevé à juste titre que, à supposer même que le requérant n’ait pas été en capacité de comparaître en personne devant l’AIPN ou que son avocat ait été à l’étranger, il pouvait soumettre des observations écrites. Dès lors, ce grief est inopérant.

41. À la lumière de ces considérations, la troisième branche du premier moyen doit être rejetée comme étant inopérante.

Sur la quatrième branche

42. Par la quatrième branche du premier moyen, le requérant soutient que le Tribunal a jugé implicitement que le requérant n’avait pas apporté d’indices concordants quant à son incapacité à se défendre, en utilisant des critères juridiquement non pertinents et en procédant à un examen incomplet des faits et des éléments de preuve.

43. Plus précisément, le requérant soutient que le Tribunal n’a pas analysé les indices de manière cumulative pour déterminer leur concordance. Il se serait, en effet, contenté d’analyser certains indices un par un. Or, le Tribunal était tenu d’analyser dans leur globalité les éléments de preuve démontrant son incapacité médicale à se défendre, et, notamment, les trois certificats médicaux qu’il avait fournis, l’avis du docteur S ainsi que les indices découlant de l’ouverture par la Commission d’une procédure d’invalidité au bénéfice du requérant. En n’analysant pas ensemble et dans leur contexte la totalité des indices ainsi que des preuves permettant d’appréhender dans sa globalité la situation médicale du requérant, le Tribunal aurait ainsi erronément appliqué la notion de “faisceau d’indices concordantsˮ.

44. Il convient de relever que l’argumentation du requérant selon laquelle le Tribunal n’a pas analysé les indices de manière cumulative pour déterminer leur concordance ne saurait prospérer.

45. En effet, force est de constater qu’un tel argument procède d’une interprétation erronée de l’arrêt attaqué. À ce titre, ainsi qu’il a déjà été précisé au point 16 de la présente prise de position, un certificat médical établit une présomption réfragable d’incapacité. À cet égard, dans son analyse, le Tribunal a examiné certains des indices avancés par la Commission, avant de juger, au point 231 de l’arrêt attaqué, qu’ils permettaient de renverser cette présomption. Dans ce contexte, il n’appartenait pas au Tribunal de présenter, à la place du requérant, des indices susceptibles de démontrer son incapacité à comparaître. Au contraire, il s’agissait d’examiner si la Commission avait fourni des indices de nature à renverser la présomption dans les circonstances de l’espèce.

46. Il s’ensuit que le requérant ne saurait valablement soutenir que le Tribunal n’a pas examiné de manière globale l’ensemble des éléments de preuve qu’il avait avancés pour déterminer leur concordance. En conséquence, cette branche doit être rejetée comme étant non fondée.

47. Dès lors, le premier moyen doit être rejeté comme étant, en partie, manifestement non fondé, en partie, inopérant et, en partie, manifestement irrecevable.

Sur le deuxième moyen

48. Par son deuxième moyen, le requérant fait valoir que le Tribunal a dénaturé un élément de preuve ayant un poids décisif pour la première faute retenue contre lui, à savoir la négociation non autorisée et clandestine d’un marché. Plus précisément, le requérant soutient que l’élément de preuve en cause, à savoir un courrier électronique en date du 6 septembre 2001, adressé par le requérant à un employé de la société G, comporte une phrase en langue anglaise qu’il avait rédigée et qui se lit comme suit : “ Of course, you will [...]ˮ (“bien sûr, vous serez [...]”).

49. À cet égard, le requérant fait valoir, en premier lieu, que cette expression, telle que présentée dans ce courrier électronique, traduit une évidence et une instruction à la société G, et n’est nullement révélatrice d’une négociation. Le rejet par le Tribunal de cet argument serait constitutif d’une dénaturation du contenu dudit courrier électronique.

50. En deuxième lieu, le requérant soutient que, en ce qui concerne le caractère prétendument confidentiel dudit courrier électronique, le Tribunal n’a ni analysé ni réfuté l’argument du requérant selon lequel la confidentialité demandée au contractant ne concernait que les flux d’informations internes à la société G et à son réseau d’instituts de sondage. Ainsi, lorsque le Tribunal a jugé, au point 93 de l’arrêt attaqué, que “le requérant n’a ni soutenu ni démontré qu’il avait averti sa hiérarchie, ou que celle-ci était au courant, du contenu du courrier électronique du 6 septembre 2001ˮ, il aurait opéré un renversement illégal de la charge de la preuve, l’AIPN n’ayant jamais démontré, ni interrogé les anciens supérieurs du requérant sur ce point, que sa hiérarchie n’aurait pas été tenue au courant du contenu du courrier incriminé.

51. En troisième lieu, le requérant soutient également que le Tribunal, à l’instar de l’AIPN, a dénaturé le contenu de ce courrier électronique, en considérant qu’il se rapportait à un “marchéˮ, alors qu’il ne concernerait qu’une prestation et un bon de commande spécifiques, sous couvert d’un contrat-cadre préexistant.

52. En quatrième et dernier lieu, le Tribunal aurait jugé à tort, au point 179 de l’arrêt attaqué, qu’il est sans incidence, dans le cadre du contrôle du respect des droits de la défense, que les différentes versions du questionnaire et le dossier financier relatif au projet en cause n’aient pas été versés au dossier, dans la mesure où il n’apparaît pas que la décision litigieuse ait été fondée sur ces documents. En effet, selon le requérant, le premier grief ne saurait être considéré comme établi sans avoir analysé les différentes versions du questionnaire et, surtout, le dossier financier relatif au sondage en cause. Ainsi, le Tribunal aurait reconnu qu’il n’a pas eu accès à l’ensemble des éléments de preuve pertinents, qu’il n’en a pas sollicité la production à la Commission et qu’il n’a, dès lors, pas pu exercer complètement son contrôle de légalité.

53. Il convient de relever que, par ce moyen, le requérant cherche à obtenir une nouvelle appréciation des éléments de preuve en cause effectuée par le Tribunal, sous couvert de dénaturation de ces éléments par ce dernier.

54. En tout état de cause, selon une jurisprudence constante, il appartient au seul Tribunal d’apprécier la valeur qu’il convient d’attribuer aux éléments de preuve produits devant lui. Cette appréciation ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation de ces éléments, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (voir, en ce sens, arrêts du 2 mars 1994, Hilti/Commission, C‑53/92 P, EU:C:1994:77, point 42, et du 11 juin 1998, H/Commission, C‑291/97 P, EU:C:1998:287, point 19).

55. En outre, lorsqu’il allègue une dénaturation des faits ou des éléments de preuve par le Tribunal, un requérant doit, en application de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour, indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par celui-ci et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation. Par ailleurs, il est de jurisprudence constante qu’une dénaturation doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves, ainsi qu’il ressort du point 13 de la présente prise de position.

56. En l’espèce, s’agissant de l’argumentation du requérant concernant l’expression “ Of course, you will [...]ˮ, laquelle traduit, selon lui, une évidence et une instruction et non pas une négociation, il convient de souligner que le Tribunal a motivé à suffisance de droit, aux points 94 et 95 de l’arrêt attaqué, la considération selon laquelle cette expression confirme, sans aucune ambiguïté, l’existence d’une négociation. Aux fins de cette appréciation, le Tribunal a pris en compte, entre autres, l’échange de courriers électroniques entre le requérant et la société G. En outre, le Tribunal a relevé, au point 95 de l’arrêt attaqué, qu’il ressortait des points 33 et 35 de la décision litigieuse que “le requérant a affirmé que le courrier électronique du 6 septembre 2001 devait être interprété comme une ‘proposition’ˮ. C’est sans commettre d’erreur d’appréciation, ni de dénaturation, que le Tribunal a conclu qu’une “propositionˮ se distingue d’une “instructionˮ.

57. S’agissant du caractère confidentiel du courrier électronique du 6 septembre 2001, le requérant soutient à tort que le Tribunal a opéré un renversement illégal de la charge de la preuve, dans la mesure où l’AIPN tripartite n’aurait jamais démontré que sa hiérarchie n’avait pas été tenue au courant du contenu de ce courrier électronique. Or, le Tribunal a bien rappelé, aux points 91 et 92 de l’arrêt attaqué, que c’est au requérant qu’il incombe d’apporter des éléments de preuve suffisants établissant le défaut de plausibilité des appréciations retenues par l’administration. En l’absence d’une telle démonstration, c’est à bon droit que le Tribunal a considéré que ledit courrier électronique contenait une demande de confidentialité à l’égard de la hiérarchie du requérant.

58. En outre, s’agissant de l’argumentation selon laquelle le courrier électronique du 6 septembre 2001 ne concernerait pas un marché, il convient de souligner que, contrairement aux allégations du requérant, le Tribunal a minutieusement examiné, aux points 89 à 120 de l’arrêt attaqué, la nature de la prestation concernée par ce courrier électronique pour en déduire qu’il s’agissait d’un marché négocié de façon clandestine et non autorisée. Or, le requérant, se contentant de réaffirmer qu’il s’agissait d’une prestation et d’un bon de commande spécifiques, sous couvert d’un contrat-cadre préexistant, souhaite, en réalité, obtenir une nouvelle appréciation des éléments de fait sans apporter aucune preuve de dénaturation. Il en résulte que le deuxième moyen est, dans cette mesure, irrecevable puisqu’il se limite à répéter les moyens et les arguments qui ont déjà été présentés devant le Tribunal, y compris ceux qui étaient fondés sur des faits expressément rejetés par cette juridiction. En effet, un tel moyen de pourvoi constitue, en réalité, une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui échappe à la compétence de la Cour dans le cadre d’un pourvoi.

59. Pour finir, s’agissant de l’allégation du requérant selon laquelle le Tribunal n’a pas exercé un contrôle juridictionnel complet, celle-ci est manifestement non fondée. En effet, dès lors que le Tribunal a constaté, dans le cadre de l’exercice de son pouvoir d’appréciation souverain, que la décision litigieuse n’avait pas été adoptée sur la base des différentes versions du questionnaire et du dossier financier relatif au projet en cause, il n’était, partant, pas tenu d’examiner ces documents.

60. Le deuxième moyen doit, dès lors, être rejeté comme étant, pour partie, manifestement irrecevable et, pour partie, manifestement non fondé.

Sur le troisième moyen

61. Par son troisième moyen, le requérant soutient que le Tribunal a rejeté à tort le moyen tiré de la violation du devoir de sollicitude prétendument commise par l’AIPN. En effet, le requérant fait valoir que, dans l’arrêt du 18 juin 2015, CX/Commission (F‑5/14, EU:F:2015:61), le Tribunal de la fonction publique avait reconnu et établi, aux points 84 à 91 de cet arrêt, que l’AIPN n’avait pas suffisamment tenu compte des intérêts du requérant, dans la mesure où la Commission s’était bornée à ne reporter qu’une seule fois l’audition devant l’AIPN tripartite, du 1 er juillet 2013 au 19 juillet suivant, soit un report de moins de trois semaines, et ce sans expliquer en quoi une telle célérité était nécessaire, alors que les faits faisant l’objet de la procédure disciplinaire en cause remontaient à près de dix ans, que le requérant était en congé de maladie, conformément à l’article 59 du statut, que son avocat ne pouvait pas participer à l’audition disciplinaire le 19 juillet 2013 et que l’AIPN était informée du fait que cet avocat était, en revanche, disponible le 8 juillet 2013. Or, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal se contenterait de prendre une position inverse, sans pour autant expliquer en quoi les constatations et les motifs retenus par le Tribunal de la fonction publique, et non contestés ultérieurement par la Cour, seraient erronés. L’arrêt attaqué violerait donc l’obligation de motivation et ne permettrait ni au requérant de connaître les justifications du caractère erroné des motifs retenus par le Tribunal de la fonction publique ni à la Cour d’exercer son contrôle juridictionnel.

62. À titre liminaire, il convient de rappeler que l’arrêt du Tribunal de la fonction publique du 18 juin 2015, CX/Commission (F‑5/14, EU:F:2015:61), a fait l’objet d’un pourvoi devant le Tribunal, ayant donné lieu à l’arrêt du 27 octobre 2016, Commission/CX (T‑493/15 P, non publié, EU:T:2016:636). À cette occasion, le Tribunal a examiné les motifs figurant aux points 84 à 91 de cet arrêt du Tribunal de la fonction publique et a jugé que la violation du devoir de sollicitude, telle que reconnue par ce dernier, reposait sur un examen incomplet des faits, sur une dénaturation de certains éléments de preuve ainsi que sur des erreurs de droit, de telle sorte que le Tribunal a annulé l’arrêt et a renvoyé l’affaire à une chambre du Tribunal autre que celle qui avait statué sur le pourvoi.

63. Partant, c’est à tort que le requérant reproche au Tribunal d’avoir violé son obligation de motivation et de l’avoir mis dans l’incapacité de connaître les motifs pour lesquels il n’a pas considéré, à l’instar du Tribunal de la fonction publique, que l’AIPN avait violé son devoir de sollicitude. En effet, cette décision du Tribunal de la fonction publique ayant été jugée erronée en droit par le Tribunal dans l’arrêt du 27 octobre 2016, Commission/CX (T‑493/15 P, non publié, EU:T:2016:636), les énonciations du point 241 de l’arrêt attaqué sont suffisantes pour considérer que ce dernier n’a pas manqué à son obligation de motivation. C’est ainsi sans violer cette obligation que le Tribunal a pu se limiter à juger que la Commission était parvenue à renverser la présomption d’incapacité du requérant à comparaître devant l’AIPN tripartite découlant du certificat médical du 10 juin 2013 et, dès lors, qu’il n’y avait pas de raison objective pour repousser de manière indéfinie l’audition du requérant.

64. Le troisième moyen doit, partant, être rejeté comme étant manifestement non fondé.

Sur le quatrième moyen

65. Par son quatrième moyen, le requérant fait valoir que le Tribunal a violé son obligation de motivation en refusant de traiter son moyen pris de la violation du principe ne bis in idem par la Commission lors de l’adoption, par cette institution, de la décision de révocation du 28 juin 2019 à la suite de l’annulation de la décision litigieuse par l’arrêt du 13 décembre 2018, CX/Commission (T‑743/16 RENV, non publié, EU:T:2018:937), dans la mesure où cette décision porterait sur les mêmes faits, contiendrait les mêmes griefs à l’encontre du requérant et conclurait à la même sanction.

66. Plus précisément, le requérant soutient que le Tribunal ne s’est pas prononcé sur la question de savoir si la décision de révocation du 28 juin 2019 pouvait être considérée comme annulant et remplaçant la décision litigieuse et si la Commission était alors tenue de retirer ou d’abroger, dès l’année 2019, la décision litigieuse, et ce alors même que le requérant avait explicitement soulevé cet argument dans ses conclusions. Le Tribunal aurait ainsi violé son obligation d’apprécier l’ensemble des moyens soulevés par le requérant et son obligation de motivation.

67. En outre, le requérant soutient que, selon les principes généraux du droit, une décision administrative individuelle faisant grief à son destinataire doit être regardée comme étant abrogée et remplacée par une décision ultérieure prise par la même autorité, concernant exactement la même personne, le même sujet, les mêmes circonstances objectives et les mêmes bases légales. Partant, le Tribunal ne pouvait pas refuser d’examiner ce moyen, qui plus est soulevé explicitement par le requérant, sans violer son obligation de prendre en compte l’ensemble des moyens présentés par lui et son obligation de motivation. Ainsi, les motifs de l’arrêt attaqué ne permettraient ni au requérant de connaître les justifications du rejet de ses arguments ni à la Cour d’exercer son contrôle juridictionnel.

68. À cet égard, il convient de souligner que c’est à tort que le requérant soutient que le Tribunal a violé son obligation de motivation en ce qu’il aurait refusé d’examiner son moyen pris de la violation du principe ne bis in idem. En effet, au point 411 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré qu’il n’y avait pas eu, en l’espèce, de violation de ce principe, dans la mesure où “c’est la seconde décision adoptée par la Commission le 28 juin 2019 qui aurait pour effet de sanctionner une deuxième fois des faits ayant déjà donné lieu à une première sanction disciplinaire. Or, cette décision fait l’objet d’un recours en annulation introduit par le requérant, enregistré sous le numéro T‑280/20, dont le traitement est suspendu dans l’attente d’une décision mettant définitivement fin à l’instance dans le présent litige”. Le Tribunal a ajouté à bon droit, au point 412 de cet arrêt, que le respect du principe ne bis in idem devra, le cas échéant, être vérifié dans le cadre du contrôle de la légalité de cette décision de révocation du 28 juin 2019.

69. Il résulte de ces considérations que, contrairement à ce que soutient le requérant, le Tribunal a répondu au moyen pris de la violation du principe ne bis in idem en rejetant celui-ci au motif que c’est non pas la décision litigieuse qui était susceptible de violer ce principe, mais, le cas échéant, la seconde décision de révocation adoptée par la Commission le 28 juin 2019, laquelle fait l’objet d’un recours pendant devant le Tribunal.

70. Le quatrième moyen doit, partant, être rejeté comme étant manifestement non fondé.

Sur le cinquième moyen

71. Par son cinquième moyen, le requérant fait valoir que le Tribunal a dénaturé ses arguments et ses conclusions en affirmant, au point 392 de l’arrêt attaqué, que le moyen tiré de la violation du principe du délai raisonnable avait “pour unique objet le délai séparant la date de la commission des faits reprochés au requérant de la date d’ouverture de la procédure disciplinaire”. À l’appui de ce moyen, le requérant soutient que son argumentation tirée du dépassement du délai raisonnable portait en réalité sur l’ensemble de la procédure, y compris devant le juge de l’Union jusqu’à ce jour. Or, un délai de plus de 20 ans entre les faits reprochés et l’arrêt mettant fin à l’instance serait manifestement et évidemment déraisonnable et disproportionné.

72. À titre liminaire, il convient de rappeler que, au point 238 de sa requête devant le Tribunal de la fonction publique, le requérant soulevait un cinquième moyen, tiré du dépassement du délai raisonnable du temps écoulé pendant “la phase antérieure à la décision d’ouverture de la procédure disciplinaire”. Ce moyen n’a été examiné ni par le Tribunal de la fonction publique dans son arrêt du 18 juin 2015, CX/Commission (F‑5/14, EU:F:2015:61), ni par le Tribunal dans l’arrêt du 27 octobre 2016, Commission/CX (T‑493/15 P, non publié, EU:T:2016:636). À cet égard, si le requérant, au point 32 de ses observations devant le Tribunal, semblait étendre la portée du moyen en rappelant que “les faits en cause remontant à près de 20 ansˮ, il a omis de développer davantage.

73. Par conséquent, il ne saurait être valablement reproché au Tribunal d’avoir interprété cet argument comme une ampliation du moyen soulevé devant le Tribunal de la fonction publique. Or, ainsi qu’il résulte de l’article 35, paragraphe 1, sous d) et e), du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique, toute requête introductive d’instance doit indiquer l’objet du litige et les conclusions du requérant ainsi que les moyens et les arguments de fait et de droit invoqués, cette indication devant être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal d’exercer son contrôle. En tout état de cause, il ressort de la jurisprudence que de nouvelles demandes ne peuvent être présentées après l’introduction de la requête (ordonnance du 3 octobre 2013, Marcuccio/Commission (C‑617/11 P, non publiée, EU:C:2013:657, point 45). En conséquence, en cas de renvoi d’une affaire devant le Tribunal, ce dernier est censé statuer sur les moyens déjà invoqués en première instance et le requérant ne saurait modifier l’objet du litige.

74. Quant à l’argument du requérant concernant le caractère raisonnable du délai écoulé jusqu’à l’ouverture de la procédure disciplinaire, il convient de souligner que le Tribunal s’est référé, aux points 393 et 394 de l’arrêt attaqué, à la jurisprudence constante de la Cour et du Tribunal selon laquelle, en l’absence d’un délai de prescription applicable à l’ouverture d’une procédure disciplinaire contre un fonctionnaire accusé d’avoir manqué à l’une de ses obligations statuaires, le caractère raisonnable du délai pris par l’institution pour adopter l’acte en cause doit être apprécié en fonction de l’ensemble des circonstances propres à chaque affaire et, notamment, de l’enjeu du litige pour l’intéressé, de la complexité de l’affaire et du comportement des parties en présence.

75. Or, sur la base de son pouvoir souverain d’appréciation des faits et des éléments de preuve, le Tribunal a jugé, aux points 393 à 405 de l’arrêt attaqué, en substance, que la Commission n’avait pas ouvert la procédure disciplinaire de manière excessivement tardive. À cet égard, dans son argumentation, le requérant ne formule aucune critique précise contre le raisonnement du Tribunal et se borne à souligner l’ancienneté des faits reprochés. Toutefois, ainsi que l’a relevé le Tribunal aux points 398 à 400 de l’arrêt attaqué, sans être contesté sur ce point par le requérant dans son pourvoi, ce dernier “a multiplié les manœuvres pour dissimuler durablement ses actes [jusqu’en 2004]ˮ, ce qui a retardé l’ouverture de l’enquête de l’OLAF en 2009. Le raisonnement du Tribunal n’est ainsi entaché d’aucune dénaturation ou d’erreur d’appréciation.

76. S’agissant de la durée de la procédure devant le juge de l’Union, même à supposer que le requérant soit recevable à étendre la portée de son moyen soulevé en première instance, il convient de rappeler que, si le non-respect du délai de jugement raisonnable est susceptible de donner lieu à une demande en indemnité par la voie d’un recours introduit par le requérant contre l’Union au titre des dispositions combinées de l’article 268 et de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, il ne saurait toutefois conduire à l’annulation de l’arrêt attaqué en l’absence d’indice selon lequel la durée de la procédure aurait eu une incidence sur la solution du litige (voir, en ce sens, arrêt du 26 janvier 2017, Aloys F. Dornbracht/Commission, C‑604/13 P, EU:C:2017:45, point 94).

77. Par conséquent, en l’absence de tout indice selon lequel la durée de la procédure aurait eu une incidence sur la solution du litige, le moyen tiré de ce que la procédure devant le juge de l’Union aurait dépassé les exigences liées au respect du délai raisonnable ne saurait conduire à l’annulation de l’arrêt attaqué et doit, dès lors, être rejeté comme étant irrecevable (arrêt du 20 mai 2010, Gogos/Commission, C‑583/08 P, EU:C:2010:287, point 57).

78. À la lumière de ce qui précède, le cinquième moyen doit être rejeté comme étant, pour partie, manifestement irrecevable et, pour partie, manifestement non fondé.

79. Il y a lieu, par conséquent, de rejeter dans son intégralité le pourvoi comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé ainsi que de condamner le requérant aux dépens exposés par l’instance, conformément à l’article 137 et à l’article 184, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour. »

6 Pour les mêmes motifs que ceux reproduits dans la présente ordonnance, il y a lieu de rejeter le pourvoi comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

Sur les dépens

7 En application de l’article 137 du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance. En l’espèce, la présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi ne soit signifié à la Commission et, par conséquent, avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il convient de décider que le requérant supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) ordonne :

1) Le pourvoi est rejeté comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

2) CX supporte ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 29 septembre 2022.

Le greffier

Le président de la VII ème chambre

A. Calot Escobar

J. Passer

* Langue de procédure : le français.

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