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Order of the Court (Eighth Chamber) of 16 November 2017. Instituto de Financiamento da Agricultura e Pescas, IP v António da Silva Rodrigues.

C-243/17 • 62017CO0243 • ECLI:EU:C:2017:873

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Order of the Court (Eighth Chamber) of 16 November 2017. Instituto de Financiamento da Agricultura e Pescas, IP v António da Silva Rodrigues.

C-243/17 • 62017CO0243 • ECLI:EU:C:2017:873

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ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

16 novembre 2017 ( * )

« Renvoi préjudiciel – Article 53, paragraphe 2, et article 99 du règlement de procédure de la Cour – Règlement (CE) no 1260/1999 – Règlement (CE, Euratom) no 2988/95 – Article 3, paragraphe 1 – Protection des intérêts financiers de l’Union européenne – Notion de “programme pluriannuel” – Champ d’application »

Dans l’affaire C‑243/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême, Portugal), par décision du 5 avril 2017, parvenue à la Cour le 10 mai 2017, dans la procédure

Instituto de Financiamento da Agricultura e Pescas IP

contre

António da Silva Rodrigues,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. J. Malenovský, président de chambre, MM. M. Safjan et M. Vilaras (rapporteur), juges,

avocat général : M me E. Sharpston,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 53, paragraphe 2, et à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3, paragraphe 1, du règlement (CE, Euratom) n o 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO 1995, L 312, p. 1).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Instituto de Financiamento da Agricultura e Pescas IP (Institut pour le financement de l’agriculture et de la pêche, Portugal) (ci-après l’« IFAP ») à M. António da Silva Rodrigues au sujet du remboursement, par ce dernier, de fonds qui lui avait été alloués au titre du cadre communautaire d’appui pour les interventions structurelles communautaires.

Le cadre juridique

Le règlement n o 2988/95

3 L’article 1 er du règlement n o 2988/95 dispose :

« 1. Aux fins de la protection des intérêts financiers [de l’Union européenne], est adoptée une réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit [de l’Union].

2. Est constitutive d’une irrégularité toute violation d’une disposition du droit [de l’Union] résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général [de l’Union] ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte [de l’Union], soit par une dépense indue. »

4 L’article 3, paragraphe 1, de ce règlement prévoit ce qui suit :

« Le délai de prescription des poursuites est de quatre ans à partir de la réalisation de l’irrégularité visée à l’article 1 er paragraphe 1. Toutefois, les réglementations sectorielles peuvent prévoir un délai inférieur qui ne saurait aller en deçà de trois ans.

Pour les irrégularités continues ou répétées, le délai de prescription court à compter du jour où l’irrégularité a pris fin. Pour les programmes pluriannuels, le délai de prescription s’étend en tout cas jusqu’à la clôture définitive du programme.

La prescription des poursuites est interrompue par tout acte, porté à la connaissance de la personne en cause, émanant de l’autorité compétente et visant à l’instruction ou à la poursuite de l’irrégularité. Le délai de prescription court à nouveau à partir de chaque acte interruptif.

Toutefois, la prescription est acquise au plus tard le jour où un délai égal au double du délai de prescription arrive à expiration sans que l’autorité compétente ait prononcé une sanction, sauf dans les cas où la procédure administrative a été suspendue conformément à l’article 6 paragraphe 1. »

5 L’article 4, paragraphe 1, dudit règlement énonce :

« Toute irrégularité entraîne, en règle générale, le retrait de l’avantage indûment obtenu :

– par l’obligation de verser les montants dus ou de rembourser les montants indûment perçus,

[...] »

Le règlement (CE) n o 1260/1999

6 L’article 1 er du règlement (CE) n o 1260/1999 du Conseil, du 21 juin 1999, portant dispositions générales sur les Fonds structurels (JO 1999, L 161, p. 1), intitulé « Objectifs », était ainsi libellé :

« L’action que mène la Communauté avec l’aide des Fonds structurels, du Fonds de cohésion, du [Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA)], section “garantie”, de la Banque européenne d’investissement (BEI) et des autres instruments financiers existants, vise à permettre la réalisation des objectifs généraux énoncés aux articles 158 et 160 du traité. Les Fonds structurels, la BEI et les autres instruments financiers existants contribuent chacun de façon appropriée à la réalisation des trois objectifs prioritaires suivants :

1) promouvoir le développement et l’ajustement structurel des régions en retard de développement, ci-après dénommé “objectif n o 1” ;

2) soutenir la reconversion économique et sociale des zones en difficulté structurelle, ci-après dénommé “objectif n o 2” ;

3) soutenir l’adaptation et la modernisation des politiques et systèmes d’éducation, de formation et d’emploi, ci-après dénommé “objectif n o 3”. Cet objectif intervient financièrement en dehors des régions concernées par l’objectif n o 1 et assure un cadre de référence politique pour l’ensemble des actions en faveur des ressources humaines sur un territoire national, sans préjudice des spécificités régionales.

Dans la poursuite de ces objectifs, la Communauté contribue à promouvoir un développement harmonieux, équilibré et durable des activités économiques, le développement de l’emploi et des ressources humaines, la protection et l’amélioration de l’environnement, et l’élimination des inégalités, et la promotion de l’égalité entre les hommes et les femmes. »

7 Aux termes de l’article 9 de ce règlement, intitulé « Définitions » :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

[...]

b) “plan de développement” (ci-après dénommé “plan”) : l’analyse, établie par l’État membre concerné, de la situation, eu égard aux objectifs visés à l’article 1 er et aux besoins prioritaires pour atteindre ces objectifs, ainsi que la stratégie et les priorités d’action envisagées, leurs objectifs spécifiques et les ressources financières indicatives qui y sont attachées ;

[...]

d) “cadre communautaire d’appui” : le document approuvé par la Commission [européenne], en accord avec l’État membre concerné, après appréciation du plan présenté par l’État membre et contenant la stratégie et les priorités de l’action des Fonds et de l’État membre, leurs objectifs spécifiques, la participation des Fonds et les autres ressources financières. Ce document est divisé en axes prioritaires et mis en œuvre par un ou plusieurs programmes opérationnels ;

[...]

f) “programme opérationnel” : le document approuvé par la Commission visant à mettre en œuvre un cadre communautaire d’appui et comportant un ensemble cohérent d’axes prioritaires composés de mesures pluriannuelles, pour la réalisation duquel il peut être fait appel à un ou plusieurs Fonds et à un ou plusieurs autres instruments financiers existants ainsi qu’à la BEI. Un programme opérationnel intégré est un programme opérationnel dont le financement est assuré par plusieurs Fonds ;

g) “document unique de programmation” : un seul document, approuvé par la Commission et regroupant les éléments contenus dans un cadre communautaire d’appui et dans un programme opérationnel ;

[...] »

8 L’article 18 dudit règlement, intitulé « Programmes opérationnels », était ainsi libellé :

« 1. Les interventions couvertes par un cadre communautaire d’appui sont menées en règle générale sous forme d’un programme opérationnel intégré par région, tel que défini à l’article 9.

2. Tout programme opérationnel comporte :

a) les axes prioritaires du programme, leur cohérence avec le cadre communautaire d’appui correspondant, leurs objectifs spécifiques quantifiés si leur nature s’y prête et l’évaluation de l’impact attendu conformément à l’article 41, paragraphe 2 ;

b) une description résumée des mesures envisagées pour mettre en œuvre les axes prioritaires, y compris les éléments d’information nécessaires pour vérifier la conformité avec les régimes d’aides au sens de l’article 87 [CE] ; le cas échéant, la nature des mesures nécessaires à l’élaboration, au suivi et à l’évaluation du programme opérationnel ;

c) un plan de financement indicatif précisant, conformément aux articles 28 et 29, pour chaque axe prioritaire et pour chaque année, le montant de l’enveloppe financière envisagée pour la participation des différents Fonds, le cas échéant de la BEI, et des autres instruments financiers – y compris à titre d’information le montant total du FEOGA, section “garantie”, pour les mesures visées à l’article 33 du règlement (CE) n o 1257/1999 [du Conseil, du 17 mai 1999, concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) et modifiant et abrogeant certains règlements (JO 1999, L 160, p. 89)] – dans la mesure où ils contribuent directement au plan de financement, ainsi que le montant total des financements publics éligibles et des financements privés estimés de l’État membre correspondant à la participation de chaque Fonds.

Ce plan de financement indique séparément, dans le total de la participation des différents Fonds, les crédits prévus pour les régions bénéficiant du soutien transitoire.

Le total de la participation des Fonds prévue annuellement est compatible avec les perspectives financières applicables, compte tenu de la dégressivité visée à l’article 7, paragraphe 3, troisième alinéa ;

d) les dispositions de mise en œuvre du programme opérationnel comprenant :

i) la désignation par l’État membre d’une autorité de gestion au sens de l’article 9, point n), chargée de la gestion du programme opérationnel, conformément à l’article 34 ;

ii) la description des modalités de gestion du programme opérationnel ;

iii) la description des systèmes de suivi et d’évaluation, notamment le rôle du comité de suivi ;

iv) la définition des procédures concernant la mobilisation et la circulation des flux financiers afin d’en assurer la transparence ;

v) la description des modalités et procédures spécifiques de contrôle du programme opérationnel.

3. Le complément de programmation comprend :

a) les mesures mettant en œuvre les axes prioritaires correspondants du programme opérationnel ; l’évaluation ex ante, conformément à l’article 41, paragraphe 3, des mesures quantifiées lorsque leur nature s’y prête ; les indicateurs de suivi correspondants conformément à l’article 36 ;

b) la définition des catégories de bénéficiaires finals des mesures ;

c) le plan de financement précisant, conformément aux articles 28 et 29, pour chaque mesure, le montant de l’enveloppe financière envisagée pour la participation du Fonds concerné le cas échéant de la BEI, et des autres instruments financiers existants, et le montant des financements éligibles publics ou assimilables et des financements privés estimés, correspondant à la participation des Fonds ; le taux de participation d’un Fonds à une mesure est fixé conformément à l’article 29 et compte tenu du total des crédits communautaires alloués à l’axe prioritaire concerné.

Ce plan de financement indique séparément les crédits prévus pour les régions bénéficiant du soutien transitoire.

Le plan de financement comporte une description des dispositions prises pour le cofinancement des mesures, compte tenu des systèmes institutionnels, juridiques et financiers de l’État membre concerné ;

d) les mesures qui doivent assurer conformément à l’article 46 la publicité du programme opérationnel ;

e) la description des modalités convenues entre la Commission et l’État membre concerné pour l’échange informatisé, si possible, des données permettant de répondre aux exigences en matière de gestion, de suivi et d’évaluation prévues par le présent règlement. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

9 Il ressort du dossier dont dispose la Cour que, par la décision C(2000) 2878, du 30 octobre 2000, la Commission a approuvé le programme opérationnel « Agriculture et développement rural » (ci-après le « programme AGRO »), au titre du cadre communautaire d’appui pour les interventions structurelles communautaires dans les régions relevant de l’objectif n o 1 (Açores, Alentejo, Algarve, Centre, Madère et Nord) et dans les régions bénéficiant du soutien transitoire au titre de l’objectif n o 1 (Lisbonne et Vallée du Tage) au Portugal (CCI n o 1999 PT 06 1 PO 007).

10 Le 20 juillet 2001, M. da Silva Rodrigues a déposé auprès de l’IFAP une demande d’aide en faveur d’un projet au titre de la mesure 5 du programme AGRO, intitulée « Prévention et rétablissement du potentiel de production agricole ».

11 Par courrier du 19 novembre 2001, l’IFAP a informé M. da Silva Rodrigues de l’approbation de son projet, pour un montant d’investissement de 7 560 000 escudos portugais (PTE) (environ 38 000 euros), auquel correspondait un concours approuvé de 5 670 000 PTE (environ 28 000 euros), uniquement pour la reconstruction de 253 m 3 de mur de pierre.

12 Le 28 décembre 2001, l’IFAP et M. da Silva Rodrigues ont conclu un contrat d’allocation d’une aide dans le cadre du programme AGRO (ci-après le « contrat du 28 décembre 2001 »). Ce contrat prévoyait le versement à M. da Silva Rodrigues d’une incitation financière à l’investissement, sous la forme d’une aide non remboursable d’un montant total de 5 670 000 PTE (environ 28 000 euros), qui devait être versée en deux tranches, respectivement les 21 décembre 2001 et 19 février 2002. Par ailleurs, M. da Silva Rodrigues acceptait de contribuer par ses fonds propres à la réalisation du projet à hauteur de 1 890 000 PTE (environ 9 500 euros).

13 La condition générale 3. A du contrat du 28 décembre 2001 était ainsi libellée :

« L’exécution matérielle du projet doit commencer dans un délai de six mois à partir de la date de signature du présent contrat, sa conclusion devant intervenir dans une période maximale de 2 ans à partir de la date susmentionnée. »

14 Le 26 juin 2002, M. da Silva Rodrigues a sollicité de l’IFAP le paiement de l’aide qui lui avait été accordée. Cette demande était accompagnée de documents faisant état de dépenses d’un montant total de 37 709,12 euros.

15 Le 13 novembre 2002, l’IFAP a autorisé le paiement à M. da Silva Rodrigues de l’aide afférente au contrat du 28 décembre 2001, pour un montant de 28 281,84 euros. Le 27 décembre 2002, cette somme a été virée sur le compte de M. da Silva Rodrigues.

16 Le projet réalisé par M. da Silva Rodrigues a fait l’objet d’un audit financier le 23 novembre 2004, à l’issue duquel il a été conclu qu’une partie des dépenses déclarées en vue de l’obtention de l’aide, soit 32 110 euros, était inéligible.

17 Au terme d’une procédure administrative, au cours de laquelle l’IFAP a adressé plusieurs communications à M. da Silva Rodrigues et lui a donné l’occasion de présenter son point de vue sur les conclusions de l’audit et sur les éléments qui lui avaient été communiqués, l’IFAP a adopté, le 31 mars 2011, une décision ordonnant le remboursement de l’aide considérée comme indûment perçue par M. da Silva Rodrigues, pour un montant de 28 281,84 euros, majoré des intérêts légaux et contractuels d’un montant de 9 570,89 euros, soit un montant total de 37 852,73 euros (ci-après la « décision du 31 mars 2011 »).

18 M. da Silva Rodrigues a formé un recours contre la décision du 31 mars 2011 devant le Tribunal Administrativo e Fiscal de Viseu (tribunal administratif et fiscal de Viseu, Portugal). Cette juridiction a, par arrêt du 5 mai 2015, fait droit au recours et annulé ladite décision, estimant que, à la date d’adoption de cette dernière, l’irrégularité reprochée à M. da Silva Rodrigues était prescrite, dès lors que plus de huit ans s’étaient écoulés entre le 26 juin 2002, date de l’irrégularité commise, et la date d’adoption de la même décision.

19 L’IFAP a interjeté appel de cet arrêt devant le Tribunal Central Administrativo Norte (tribunal administratif central du Nord, Portugal). Par arrêt du 21 avril 2016, cette dernière juridiction a rejeté l’appel et confirmé la décision de première instance.

20 L’IFAP a formé un pourvoi devant la juridiction de renvoi contre l’arrêt du Tribunal Central Administrativo Norte (tribunal administratif central du Nord). Il fait valoir que, à la date d’adoption de la décision du 31 mars 2011, le programme AGRO n’était pas encore clos, ce qui faisait obstacle à ce que l’irrégularité prétendument commise par M. da Silva Rodrigues soit prescrite en vertu de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, seconde phrase, du règlement n o 2988/95.

21 La juridiction de renvoi indique qu’une clarification est nécessaire quant à la définition de la notion de « programme pluriannuel », au sens de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, seconde phrase, du règlement n o 2988/95 et au calcul du délai de prescription applicable dans le cas d’un programme tel que le programme ARGO.

22 C’est dans ce contexte que le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême, Portugal) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) À partir de quelle date le délai de prescription de quatre ans visé à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, [du règlement n o 2988/95] pour les infractions instantanées (non continues ou répétées) commence-t-il à courir ?

2) La disposition selon laquelle “[p]our les programmes pluriannuels, le délai de prescription s’étend en tout cas jusqu’à la clôture définitive du programme” s’applique-t-il dans le cas d’une infraction qui n’est ni continue ni répétée ?

3) La règle visée à ce même article 3 selon laquelle “la prescription est acquise au plus tard le jour où un délai égal au double du délai de prescription arrive à expiration sans que l’autorité compétente ait prononcé une sanction” s’applique-t-elle également lorsqu’il est question d’un programme pluriannuel, à savoir le délai y visé s’étend-il aussi “jusqu’à la clôture définitive du programme” ?

4) Quel est le sens de l’expression “[p]our les programmes pluriannuels, le délai de prescription s’étend en tout cas jusqu’à la clôture définitive du programme” :

a) la prescription n’est jamais acquise avant la clôture définitive d’un programme pluriannuel ?

b) le délai de prescription est suspendu pendant la durée du programme, à savoir jusqu’à sa clôture définitive et recommence à courir à partir de cette date-là ?

c) le délai de prescription continue à courir, par conséquent même s’il s’agit d’un programme pluriannuel, la prescription peut être acquise avant la clôture définitive du programme si, entre temps, ce délai s’est écoulé ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

23 En vertu de l’article 99 de son règlement de procédure, lorsqu’une réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

24 Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre de la présente affaire, s’agissant de la réponse à la première question.

25 Par sa première question, la juridiction de renvoi cherche, en substance, à connaître la date à compter de laquelle court le délai de prescription de quatre ans visé à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n o 2988/95, dans le cas d’une irrégularité qui n’est ni continue ni répétée.

26 Il y a lieu de rappeler à cet égard que, ainsi que la Cour l’a jugé au point 53 de son arrêt du 15 juin 2017, Alytaus regiono atliekų tvarkymo centras (C‑436/15, EU:C:2017:468), il ressort du libellé de l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n o 2988/95 que le délai de prescription des poursuites court à compter de la date de réalisation de l’irrégularité constatée.

27 Partant, il convient de répondre à la première question que l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n o 2988/95 doit être interprété en ce sens que, dans le cas d’une irrégularité qui n’est ni continue ni répétée, le délai de prescription de quatre ans qu’il vise court à compter de la date de réalisation de l’irrégularité.

Sur les deuxième à quatrième questions

28 Conformément à l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque la Cour est manifestement incompétente pour connaître d’une affaire ou lorsqu’une demande ou une requête est manifestement irrecevable, la Cour, l’avocat général entendu, peut à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

29 Il convient de faire application de ladite disposition dans la présente affaire, s’agissant des deuxième à quatrième questions.

30 Selon une jurisprudence constante de la Cour, la procédure instituée par l’article 267 TFUE est un instrument de coopération entre la Cour et les juridictions nationales, grâce auquel la première fournit aux secondes les éléments d’interprétation du droit de l’Union qui leur sont nécessaires pour la solution du litige qu’elles sont appelées à trancher (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 1992, Meilicke, C‑83/91, EU:C:1992:332, point 22, ainsi que ordonnance du 8 septembre 2016, Caixabank et Abanca Corporación Bancaria, C‑91/16 et C‑120/16, non publiée, EU:C:2016:673, point 13).

31 Dans le cadre de cette coopération, les questions portant sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. Cependant, une demande formée par une juridiction nationale doit être rejetée lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (voir, en ce sens, arrêts du 5 décembre 2006, Cipolla e.a., C‑94/04 et C‑202/04, EU:C:2006:758, point 25, ainsi que du 21 septembre 2016, Radgen, C‑478/15, EU:C:2016:705, point 27).

32 En l’occurrence, il ressort des propres indications données par la juridiction de renvoi, résumées au point 21 de la présente ordonnance, que les deuxième à quatrième questions sont fondées sur la prémisse selon laquelle le programme AGRO relève de la notion de « programme pluriannuel », au sens de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, deuxième phrase, du règlement n o 2988/95.

33 Il convient, toutefois, de constater que, selon ces mêmes indications, le programme AGRO constitue un programme opérationnel, au sens de l’article 9, sous f), du règlement n o 1260/1999, préparé par la République portugaise et approuvé par la Commission.

34 Or, il découle de l’article 9, sous f), et de l’article 18, paragraphe 2, du règlement n o 1260/1999 qu’un programme opérationnel, au sens de ce dernier règlement, se borne à définir les axes prioritaires du programme et ne comporte, notamment, qu’une description résumée des mesures envisagées et un plan de financement indicatif.

35 Pour sa part, la notion de « programme pluriannuel », au sens de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, seconde phrase, du règlement n o 2988/95, suppose une pluralité d’actions concrètes.

36 Par conséquent, l’utilisation, dans le règlement n o 1260/1999, du terme « programme », pour un programme opérationnel, au sens de ce règlement, ne suffit pas pour qualifier un tel programme de « programme pluriannuel », au sens de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, seconde phrase, du règlement n o 2988/95.

37 Du reste, dans son arrêt du 15 juin 2017, Alytaus regiono atliekų tvarkymo centras (C‑436/15, EU:C:2017:468, points 46 et 48), la Cour a jugé que le terme « programme » a une portée large et qu’il n’y a pas lieu d’établir un rapport terminologique étroit entre la notion de « programme pluriannuel » et les notions qui sont employées dans les divers instruments qui établissent les différents fonds octroyant un concours financier.

38 Certes, il ne peut être exclu qu’un programme opérationnel, tel que le programme AGRO, contienne déjà des actions concrètes à mettre en œuvre, susceptibles de former un programme pluriannuel, au sens de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, seconde phrase, du règlement n o 2988/95.

39 Cependant, en l’occurrence, la décision de renvoi ne contient aucune précision quant au contenu exact de la décision C(2000) 2878 de la Commission, du 30 octobre 2000, approuvant le programme AGRO ou à la teneur précise de ce programme.

40 Dans ces conditions, il doit être constaté que la Cour ne dispose pas de tous les éléments de fait ou de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées.

41 Par conséquent, en application de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure, il y a lieu de considérer que les deuxième à quatrième questions posées par la juridiction de renvoi sont manifestement irrecevables.

Sur les dépens

42 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) dit pour droit :

1) L’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement (CE, Euratom) n o 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, doit être interprété en ce sens que, dans le cas d’une irrégularité qui n’est ni continue ni répétée, le délai de prescription de quatre ans qu’il vise court à compter de la date de réalisation de l’irrégularité.

2) Les deuxième, troisième et quatrième questions posées par le Supremo Tribunal Administrativo ( Cour administrative suprême, Portugal ) sont manifestement irrecevables.

Signatures

* Langue de procédure : le portugais.

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